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« Les importations de produits pétroliers nécessitent beaucoup de devises » Véronique Moampea Mbio directeur général de la SCDP

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(BFI) – Dans un échange avec la presse, Mme Moampea Mbio, directrice générale de la Société camerounaise de dépôts pétroliers (Scdp) revient sur les causes de l’absence des produits pétroliers au Cameroun. Pour elle, le Cameroun est approvisionné par voie d’importation. Depuis mai 2019, notre outil de production a été endommagé par un incident qui a paralysé toutes les colonnes de distribution permettant d’avoir des produits raffinés à partie de notre raffinerie, la Sonara.

Le carburant se fait rare à la pompe depuis quelques jours. Pouvez-vous nous dire quel est le mécanisme d’approvisionnement du Cameroun en produits pétroliers ? 

Le Cameroun aujourd’hui est approvisionné par voie d’importation, car depuis mai 2019, notre outil de production a été endommagé par un accident ayant paralysé toutes les colonnes de distillation permettant d’avoir des produits raffinés à partir de la Sonara. Immédiatement, le gouvernement a mis en place un schéma d’approvisionnement à travers les importations. Ce schéma a pris effet à partir de mars 2020 par appel d’offres et ce sont les traders qui devaient nous livrer les produits pétroliers. Cette situation était sans compter pour le contexte international actuel. Ces rappels signifient que notre pays est approvisionné via la Sonara et d’autres importateurs par les traders. Ces derniers nous apportent le produit et le livrent progressivement en fonction des enveloppes et en fonction de la capacité financière de chaque importateur.

Quelle est la responsabilité de la Société camerounaise des Dépôts pétroliers dans la situation actuelle ?

La Société camerounaise des Dépôts pétroliers (SCDP) n’est pas un producteur de brut, ni n’est pas non plus un vendeur, encore moins un importateur de produits. La SCDP intervient uniquement dans la chaîne logistique. Je veux parler ici du stockage et de la distribution à partir du dépôt principal de Douala vers les dépôts intérieurs. Les produits stockés dans les bacs de la SCDP appartiennent aux marketeurs qui ont acheté le produit auprès des importateurs. Il arrive que les marketeurs soient en même temps des importateurs.

Je rappelle qu’il s’agit de deux activités bien différentes : l’importation des produits pétroliers et leur distribution sur le marché national. La SCDP reçoit donc les produits de ces marketeurs et de ces importateurs à partir de la Sonara par cabotage du port de Limbé vers le dépôt principal de Douala et directement à partir du Port autonome de Douala.

La responsabilité de la SCDP réside donc en ce qu’elle devrait gérer les stocks qui lui sont confiés en bon père de famille comme j’ai l’habitude de le dire. En d’autres termes, en fonction de ce que nous avons, nous le mettons à la disposition du marché. En somme, la SCDP n’intervient que pour redistribuer. Nous remettons aux propriétaires les produits pétroliers qu’ils ont stockés dans nos cuves. L’autre partie des produits pétroliers stockés à la SCDP est destiné au stock de sécurité. 

La pénurie actuellement observée dans les stations-service pourrait-elle avoir un lien avec les événements d’Ukraine ?

Depuis l’incendie de la Sonara, étant à la merci du marché international évoluant au gré des fluctuations des cours du marché pétrolier, nous sommes fragilisés en ce qui concerne l’approvisionnement en produits pétroliers. La deuxième raison pour laquelle nous connaissons ce problème est la rareté des devises. Ça, on ne le dit pas assez, mais les importations de produits pétroliers nécessitent beaucoup de devises. Ceci nous amène à un déséquilibre au niveau de la balance commerciale. Il y a six mois par exemple, une cargaison de 10 à 12000 tonnes de triple produit coûtait cinq millions de dollars. En raison de la crise en Ukraine, de la rareté des produits, la même cargaison coûte aujourd’hui 15 millions de dollars. Si vous faites la différence, vous allez comprendre sous quelle pression la BEAC se trouve en même temps que les autres banques en ce qui concerne le financement d’un tel volume d’activité économique.

Depuis cette tension, on observe que certaines stations-service ont des produits pétroliers et d’autres pas. Pourquoi ?

Il arrive que dans la situation actuelle, certains marketeurs n’aient pas la possibilité de financer leur achat de produits pétroliers, mais aussi éprouvent des difficultés, pour ceux qui ont même la possibilité, à trouver ce que nous appelons dans le jargon technique, des lettres de crédit qui permettent d’acheter les produits pétroliers auprès des traders.

Lorsque je disais tantôt que le prix d’une cargaison est passée du simple au triple en quelques mois, cela voudrait dire que les disponibilités, les lignes de crédit que les banques allouent aux différents importateurs sont largement dépassées de même que cette situation entraîne les banques à se refinancer auprès de leurs maisons mères pour pouvoir tenir face à cette pression du marché. Donc, le mécanisme d’approvisionnement des produits pétroliers, en fonction de la situation du marché international, entraine inévitablement ce que nous appelons aujourd’hui le manque à gagner de l’Etat. Le ministre de l’Eau et de l’Energie a fait un communiqué qui présente bien la situation actuelle, avec un manque à gagner pour le premier semestre qui s’élève à un peu plus de 317 milliards de Fcfa.

Que doivent comprendre les consommateurs ?

Globalement, les consommateurs doivent savoir que pour ce mois de juillet, pour chaque litre de gasoil pris à la station à 575 Fcfa, le gouvernement, à travers les instructions du président de la République, paie 778 Fcfa. En ce qui concerne le super, le gouvernement subventionne chaque litre à 643 Fcfa.

Pour chaque litre de pétrole lampant que nous achetons à 350 Fcfa à Douala, le gouvernement débourse 758 Fcfa. Alors, devant cette situation, vous comprenez que les finances publiques soient aussi sous pression. 317 milliards de subventions en six mois nous amèneraient dans les estimations actuelles à plus de 600 milliards en fin d’année. Il faut donc que quelqu’un paie. Au marché international, les produits pétroliers sont payés cash. Quelle que soit la tension que vous allez observer aujourd’hui, de manière progressive, dans les prochains jours, nous allons remonter les produits pétroliers. Il faut relever qu’au niveau de Douala, dès que nous avons un navire, il est facile d’alimenter Douala, mais à cause de la distance qui nous sépare des autres dépôts intérieurs de Yaoundé, on peut prendre encore 24 heures pour que les produits arrivent à destination. Aussi, appelons-nous les consommateurs à la patience face à une telle situation.

Au niveau de Limbe, nous disposons actuellement d’un navire de 28 mille mètres cube de super, 88 mille mètres cube de gasoil en attente de déchargement dès que les conditions financières seront réunies. Au niveau du large ici à Douala, nous sommes en train de décharger 17 mille mètres cube de gasoil, 15 mille mètres cube de super et 12500 mètres cube de jet. Au moment où je vous parle, nous venons de faire entrer le navire de gasoil qui permettra aux consommateurs dès ce soir (13 juillet 20222, NDLR) de trouver du nécessaire à la pompe.

Rédaction
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