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Après-Covid-19, l’Afrique peut compter sur ses femmes

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(BFI) – Championnes du monde de l’entrepreneuriat, les Africaines ne s’en laissent pas compter sur le plan de l’innovation avec des solutions astucieuses et inclusives. Illustration.

« Il faut faire confiance aux femmes pour se relever du Covid-19. » C’est là une conviction forte ancrée chez Vanessa Moungar (Photo), directrice du département genre, femmes et société civile à la Banque africaine de développement et membre du conseil présidentiel pour l’Afrique mis en place par Emmanuel Macron dans sa réflexion en direction du continent. Pour elle, il est important de partager les meilleures pratiques pour accélérer les progrès en matière d’égalité des sexes, mais aussi d’autonomisation des femmes en Afrique et dans le monde.

Les femmes, porteuses de solutions contre le Covid-19…

Aux yeux de Vanessa Moungar, les femmes africaines sont « les colonnes vertébrales de l’économie africaine et des leviers d’accélération formidable pour la croissance inclusive du continent ». Sans elles, aucune réponse efficace ne pourra être apportée aux problèmes économiques liés à la crise du Covid-19. Un avis partagé par Jacqueline Mukarukundo, cette jeune Rwandaise qui a créé Wastezon, une application mobile qui met en relation les foyers et les industries du recyclage pour traiter les déchets dans le cadre d’un processus respectueux de l’environnement. Face à la crise sanitaire, elle a rapidement fait évoluer sa solution pour l’adapter à la situation. « Le produit que nous développons actuellement contribuera à l’élimination des masques utilisés afin de protéger l’environnement et de prévenir d’éventuelles infections, dit-elle indiquant d’ailleurs que « c’est le bon moment pour faire preuve de créativité et d’innovation ». « En Afrique, nous n’avons pas de système technologique qui peut aider à prévenir la propagation du Covid-19, nous devons donc intervenir pour fournir des idées et des solutions qui peuvent résoudre les problèmes liés au virus », poursuit-elle.

C’est ce que s’est empressée de faire Arielle Kitio, la co-fondatrice de la start-up camerounaise Caysti, un centre d’éveil technologique dédié à la créativité et à la promotion de l’entrepreneuriat des jeunes via le numérique. Elle a développé en partenariat avec l’Unicef un assistant virtuel pour le ministère de la Santé et a lancé une plateforme e-learning online et offline avec une connexion gratuite pour assurer la continuité des formations.

Une illustration de la capacité d’innovation des femmes entrepreneures africaines qui ont su réagir avec efficacité devant la crise. Pas surprenant quand on sait qu’en Afrique subsaharienne, les femmes sont 30 % plus actives dans les start-up que les hommes avec un niveau de diplôme équivalent.

… sur un continent champion du monde de l’entrepreunariat féminin

Il faut en effet retenir que 21,8 % (1) des femmes en Afrique sont entrepreneures. Ce taux est le plus important à l’échelle mondiale. Elles produisent à elles seules 65 % du PIB du continent. « Les femmes réinvestissent 90 % dans leur foyer », rappelle Vanessa Moungar qui, en partenariat avec d’autres banques multilatérales de développement (Banque mondiale, Banque asiatique de développement, etc.) du Global Gender Summit, était présente à Kigali en novembre dernier avec pour objectif de partager les meilleures pratiques et d’accélérer les progrès en matière d’égalité des genres et d’autonomisation des femmes en Afrique et dans le monde. Sommet lors duquel la Banque africaine de développement et des organisations régionales africaines (Cedeao, Comesa et EAC) ont annoncé le lancement du projet digital « 50 Million African Women Speak (2) ». Objectif : relier 50 millions de femmes d’affaires africaines à travers une plateforme numérique disponible sur le Web et sur des appareils mobiles sous forme d’application.

Cette plateforme s’inscrit dans la dynamique de rendre économiquement autonomes des millions de femmes africaines en leur offrant un guichet unique pour leurs besoins spécifiques d’information. De quoi leur permettre de créer et de développer des entreprises.

L’Africaine, cette entrepreneure dans l’âme

« Beaucoup de femmes ont vu leur mère créer de la richesse, d’où une fibre entrepreneuriale développée chez la femme africaine », souligne Fatim Niang Niox. La co-fondatrice du hub Jokkolabs Dakar, créé en 2010, sillonne les zones rurales. Son objectif : s’appuyer sur le numérique pour aider les femmes à plus de résilience, mais aussi pour lutter contre les fractures sociales et économiques. « Les femmes créent et innovent par des solutions accessibles à tous et à des budgets moindres. Elles ont une empathie très développée et créent aussi pour subvenir à des besoins alimentaires et nourrir tout simplement leur famille », explique-t-elle.

Jacqueline Mukarukundo en est également intimement convaincue. « Dans de nombreux pays africains, il y a des changements massifs dans le secteur du numérique et de nombreux programmes économiques de la part des sociétés civiles ou des entreprises privées sont lancés en faveur des femmes », dit-elle, avant d’ajouter : « Leur contribution a été reconnue. Je crois donc que les femmes peuvent être une source de développement socio-économique de nos pays en fonction de leur capacité à mener plusieurs tâches, à communiquer, à s’adapter, etc. ».

Pour Arielle Kitio, une dimension plus universelle doit être apportée à ce combat : « Il faut détacher le débat de la question unique du genre et des origines, et se recentrer sur le fondamental qui est l’inclusion et l’acceptation de l’autre », dit-elle. « Le numérique est un formidable outil qui porte l’éducation de l’humanité, véhicule des valeurs morales et qui permettra de faire évoluer les mentalités », poursuit-elle. Une vision qui, à certains égards, s’inscrit dans la dynamique de la vision de Vanessa Moungar pour qui l’avenir économique de l’Afrique repose sur une coopération globale, une solidarité et l’acceptation d’un destin commun.

Une pertinence de plus en plus constatée…

La profondeur de réflexion ainsi que les expériences de Vanessa Moungar, Arielle Kitio, Jacqueline Mukarukundo et Fatim Niang Niox ont retenu l’attention au niveau international où leur pertinence a été constatée à côté de celle de la Marocaine Hanae Bezad et la Nigériane Nneka Mobisson.

La première est fondatrice de Douar Tech, une organisation qui promeut l’indépendance économique des jeunes dans les douars, en particulier des femmes issues de milieux précaires dans les zones rurales du Maroc. Son outil : des formations à l’entrepreneuriat innovant et aux technologies intensives. Ses classes sont disponibles en arabe marocain, français et anglais. 100 étudiants en 2020 ont bénéficié de ses enseignements et des projets pilotes sont actuellement mis en oeuvre au Sénégal, en Jordanie et en Tunisie.

a deuxième, Nneka Mobisson, est co-fondatrice de mDoc Healthcare, une entreprise sociale qui vise à réduire considérablement le poids des maladies chroniques en Afrique subsaharienne. Elle fournit aux malades un soutien intégré en matière de soins grâce à des plateformes mobiles et Internet par lesquelles un accès 24 heures/24 et 7 jours/7 est possible à des médecins, des infirmières et des prestataires de soins de santé connexes accrédités virtuellement, par SMS et par des plateformes vocales et vidéo. 

… et reconnue

Toutes ces femmes inspirantes viennent d’être distinguées (Arielle Kitio l’a été en 2019) du prix les Margaret qui récompense, dans le cadre de la Journée de la femme digitale (JFD), les actrices de l’innovation en Afrique et en Europe.

Fondatrice de la JFD, Delphine Remy Boutang les qualifie tout simplement de « rôles modèles » et salue « leur créativité, leur persévérance, leur empathie, leur énergie, inventivité et puissance ». De quoi être encore plus fière de les voir distinguées par les JFD, créées pour accompagner et porter la voix des femmes entrepreneures dans le numérique. « On déplore un manque d’accompagnement des femmes et l’absence de modèles féminins dans le secteur », dit Delphine Remy Boutang dont « l’objectif est de pointer du doigt les stéréotypes et les représentations véhiculées par la société sur le genre. Le numérique est un moyen pour réduire les fractures sociales« . « Nous souhaitons faire évoluer les habitudes culturelles, susciter les vocations chez les plus jeunes, lever les barrières, inspirer et encourager les femmes à se révéler et à être des actrices de l’innovation », poursuit-elle. Et de conclure que « le prix les Margaret est aussi l’occasion d’intégrer les start-up locales dans un écosystème plus global« . Quoiqu’il en soit, l’Afrique y tient toute sa place puisque, cette année, la majeure partie des projets présentés est venue du continent africain. Voilà qui illustre combien, en jouant la carte de l’innovation impulsée par ses entrepreneurs, l’Afrique augmente des moyens de faire face aux défis qui l’attendent au-delà des crises sanitaire et économique dues au Covid-19.

Le Point Afrique

Rédaction
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