(BFI) – Sur le continent, plus de 600 millions de personnes vivent sans électricité, dont plus de 80% dans les zones rurales. Pour la tranche de la population, essentiellement urbaine, qui a le privilège d’accéder à l’énergie électrique, il faut également faire avec les coupures intempestives.
Sur un continent où la plupart des innovateurs technologiques et autres tech entrepreneurs doivent se débrouiller sans financements, les problèmes d’accès à une énergie électrique stable et de qualité s’imposent comme un obstacle supplémentaire au potentiel de création d’emplois et de richesses des TIC.
Selon le World Economic Forum, la future croissance de l’Afrique est davantage dans l’innovation technologique que dans l’industrialisation. Les TIC ont en effet le pouvoir d’offrir au continent les moyens de répondre plus efficacement à un certain nombre de défis, notamment dans les secteurs de l’agriculture, de la santé, de l’éducation, des transports, etc.
L’innovation technologique a également le pouvoir de remodeler les systèmes de gouvernance en Afrique et de favoriser une plus grande équité, de la transparence et de l’efficacité dans la gestion de la richesse publique.
L’Intelligence Artificielle, la Blockchain, l’Internet des Objets sont autant de domaines où l’innovation a le pouvoir de transformer les conditions de vie des 1,5 milliard de personnes qui peuplent l’Afrique et dont le nombre ne cesse de croître. Mais, le potentiel transformateur que renferme l’innovation technologique est trop souvent asphyxié par la crise énergétique que subit le continent.
Frein à l’illumination
Au Nigeria qui abrite l’une des plus vibrantes scènes africaines de l’innovation technologique, et où opèrent plusieurs distributeurs d’énergie électrique grâce à la libéralisation du marché intervenue en 2003, Center for Global Developement (CGD) a mené une étude pour déterminer précisément quel impact ont les multiples coupures d’électricité sur les innovateurs et tech entrepreneurs.
Il ressort de cette étude que, pour 57% des entreprises technologiques retenues dans l’échantillon de recherche, l’accès à l’électricité de qualité représente un obstacle majeur dans la conduite de leurs activités de développement et de service. 30% des entreprises considèrent les problèmes d’électricité comme un obstacle modéré. Pour l’ensemble des entreprises technologiques prenant part à l’étude, le nombre élevé de coupure d’électricité- une trentaine mensuelle- empêche de vraiment travailler.
Dans l’étude, la majorité des entreprises interrogées indiquent également avoir enregistré une perte financière représentant jusqu’à 20% de leur revenu due aux perturbations dans l’alimentation en énergie électrique. Plus de 90% des entreprises interrogées révèlent avoir investi dans l’acquisition ou le partage d’un générateur, et indiquent que ce moyen d’approvisionnement en énergie électrique est également coûteux et ne permet pas véritablement compenser les pertes dues aux coupures d’électricité.
Un autre des grands pôles de l’innovation technologique et numérique du continent, celui d’Afrique du Sud, connaît également des freins dans son dynamisme du fait de coupures répétées d’énergie électrique. La situation s’est d’ailleurs davantage empirée depuis trois ans avec les difficultés que traverse l’Eskom, l’entreprise publique de distribution d’énergie électrique.
En décembre dernier, le président directeur général de la Chambre nationale des petites entreprises, Mike Anderson, indiquait que « les créateurs d’emplois réduisent leurs effectifs et/ou font faillite » à cause de cette situation.
Un potentiel restreint
En 2019, le secteur africain de l’innovation technologique a attiré un investissement de 1,340 milliard de dollars US, selon l’African Venture Capital Report de WeeTracker. De nombreuses entreprises se sont renforcées, d’autres ont vu le jour, grâce à la reconnaissance du potentiel de leurs idées par des investisseurs. De milliers d’emplois ont vu le jour. Mais qui sait quel volume d’investissement et de richesses pourrait générer l’Afrique si au moins la moitié des populations de ses 54 nations, accédaient à une électricité régulière, stable et de qualité.
André Noir