(BFI) – Aïssatou Diouf est une femme brillante, l’une des rares à avoir accédé au Top management des filiales africaines du Groupe CFAO. Cette sénégalaise, native de Dakar, assure les fonctions de General Manager en charge du développement de la marque Suzuki au sein de la filiale nigériane du groupe. Une position stratégique que la multinationale n’a pas hésité à confier à une femme….mais pas n’importe laquelle ! Il faut dire que côté profil Aïssatou remplissait toutes les cases.
C’est après des études secondaires et universitaires effectuées à Abidjan puis Dakar, et près de 10 ans d’expérience professionnelle dans le Groupe CFAO (notamment comme au Sénégal, au Mali, en Algérie et au Burkina Faso), que Aïssatou décide de se lancer dans une formation MBA, afin, dit-elle de parfaire sa formation en gestion et management. On est en 2008, elle s’inscrit à de l’Université Paris Dauphine en France et y obtient un Master of Business Administration. Ce sésame en poche, et nantie d’une importante expérience professionnelle, Aïssatou ne tarda pas à gravir les échelons.
Le groupe CFAO qui l’avait embauchée, quelques années plus tôt, continue alors de lui confier des responsabilités de plus en plus importantes, notamment des missions « pompier » dans plusieurs pays. Elle continue donc à séjourner notamment, souvent sur de longues périodes au Nigeria, Liberia, Bénin sur des positions de développement opérationnel et managériale dans des filiales nouvellement acquises, des Start-up ou encore des redémarrages de Marques
Quand on lui demande si être une femme a été un atout ou un frein à sa carrière, cette « avocate » déterminée de la cause des femmes, tout en étant lucide, avoue prendre un malin plaisir à être là où on ne l’attend pas. « Moi j’ai eu deux challenges à relever : celui d’être une femme et celui d’être manager dans une multinationale. Rien n’était acquis d’avance il fallait se battre tous les jours et prouver qu’on était à la hauteur de la mission confiée ». Elle ajoute avoir dû affronter les barrières culturelles dans les différents pays d’affectation, sans pour autant en faire une fixation.
Sur les qualités managériales reconnues à une femme, Aïssatou semble catégorique : « La femme est très compétente en situation de crise, parce qu’elle a le sens du détail, elle peut également gérer plusieurs choses à la fois ». Mais pas question de parité pour cette adepte du mérite. Pour elle, ce ne sont que des slogans, « Il faut plutôt donner les mêmes chances à tous et surtout faire un travail de sensibilisation à la base et sur du long terme ».
Pas non plus question pour elle de se revendiquer militante féministe. « Il est dommageable de mettre la moitié de l’humanité en accusation. » Le mot militante la gêne aussi. « Il rappelle le combat, le rapport de force ». Par contre, oui, elle « aspire au changement ».
A commencer par accroître la visibilité des femmes dans les médias et donner la parole à des expertes, des spécialistes en toutes sortes de domaines. Des femmes qui, à son image, se sont fait une place dans les milieux traditionnellement masculins que sont l’entreprise, l’économie ou encore la politique. Objectif : « faire bouger les lignes ». Car pour elle, la femme n’a pas assez confiance en elle-même, « c’est dû au poids de la culture, il faut des exemples, de l’accompagnement. Il faut casser les barrières, briser la glace par l’éducation. Les femmes doivent aujourd’hui se donner les moyens d’accéder à des postes à responsabilité »
Il est vrai que les femmes africaines capables de livrer une expertise existent, et sont tout aussi crédibles que les hommes et méritent d’être entendues. Encore faut-il que soient menées des actions de lobbying auprès des médias pour que ces expertes soient interrogées et entendues.
Aïssatou Diouf exerce aujourd’hui ses fonctions à Lagos au Nigéria où, à l’entendre, la question de l’invisibilité des femmes dans les sphères de décision n’est plus d’actualité. « Au Nigéria, les femmes sont présentes dans les cercles de décision et on les voit ». Comme quoi, l’écart entre pays africains francophones et anglophones ne se limiterait donc pas au plan économique, il concernerait également le cadre de la promotion de la femme.
En ce qui concerne sa propre carrière, Aïssatou espère bien diriger une filiale à part entière. Elle pense avoir aujourd’hui toutes les compétences requises, pour endosser cette responsabilité et apporter toute son expertise sur le plan régional, et de ce fait plus de valeurs ajoutées dans l’entreprise. En attendant, elle compte bien user de sa position pour plaider la cause de la femme africaine, en espérant qu’elles seront demain, encore plus nombreuses à lui emboiter le pas.
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