(BFI) – Face à la prolifération des déchets électroniques, une ONG camerounaise a décidé d’en débarrasser Douala. Les agents de l’organisation sillonnent la ville pour en faire la collecte contre rémunération. Des déchets qui une fois triés sont expédiés à des partenaires en France qui se chargent de les recycler.
À bord de sa moto, ce jour-là à Douala, Roger Taleng prend la route du marché de Ndogpassi, un quartier situé à la sortie est de la ville. Casque à la tête et une caisse fixée à l’arrière de l’engin, ce collecteur de déchets électroniques a rendez-vous avec quelques vendeurs et réparateurs d’appareils électroniques.
«Généralement le matin, j’appelle quelques réparateurs d’appareils électroniques pour savoir s’ils ont des déchets stockés et moi mon travail est d’aller les récupérer sur place. Sur la route, je sensibilise également d’autres personnes pour qu’ils mettent à notre disposition leurs déchets », renseigne-t-il à Sputnik avant de prendre la route.
Roger Taleng, comme d’autres collecteurs, est employé de la Fondation camerounaise de la terre vivante (FCTV), une association à but non lucratif dont l’atelier est basé à Douala, la capitale économique du pays, et qui œuvre dans l’éducation environnementale et le développement durable. Ses agents sillonnent les artères de la ville et des localités situées à la périphérie, pour récupérer des déchets électroniques afin de les convoyer dans les ateliers de la FCTV. Un service à la fois écologique et économique qui fait le bonheur des réparateurs d’appareils électroniques comme Michel Fokou rencontré lors de la tournée de notre collecteur.
«Avant qu’est-ce qu’on faisait de ces déchets? On les mettait juste dans la poubelle pour les jeter à la décharge. Maintenant non seulement la FCTV vient les récupérer sur place, en plus nous sommes payés par kilogramme et enfin, l’environnement est protégé», confie-t-il heureux à Sputnik.
Une passion pour la protection de l’environnement
En effet, le kilogramme de cartes électroniques d’ordinateurs par exemple est acheté par l’association à près 3.700 francs CFA (5,64 euros), 12.000 francs CFA (18,28 euros) le kilo de ram d’ordinateurs, 100 francs CFA (0,15 euro) la pièce pour les processeurs de téléphone… De quoi motiver de nombreux autres collecteurs indépendants qui sillonnent la ville de Douala et ses environs à la recherche de ces résidus qui autrefois finissaient dans les poubelles, avant de les revendre, aux prix indiqués, à l’ONG.
Si le pays a déjà du mal à collecter les ordures ménagères qui inondent parfois les rues des principales villes, l’explosion technologique a généré la flambée des déchets électroniques. Les téléphones mobiles usagés, les cartes mères et les vieux ordinateurs jonchent de plus en plus les artères des cités ou finissent brûlés par les usagers. Une démarche, prévient Éric Martial Biyong, chef d’atelier de la FCTV, aux conséquences fâcheuses pour la santé et l’environnement.
«Ce qu’il faut savoir c’est que ces composants électroniques contiennent par exemple du plomb qui, une fois inhalé, peut altérer les capacités mentales et provoquer des troubles du comportement. Vous imaginez bien les dégâts que des composants comme le lithium, présent dans les batteries de téléphone, peut avoir sur les organismes vivants et la nature en général», souligne-t-il.
Depuis 2016, date de début de cette activité, plus de 60 tonnes de déchets de téléphones en fin de cycle de vie et autres déchets électroniques ont déjà été collectées. Dans les détails, 12.137,50 kilos de déchets de téléphones mobile collectés en 2016, 12.213,74 kilos l’année suivante. 13.708,89 kilos collectés en 2018 et 14.938,6 kilos en 2019. En ce qui concerne les cartes électroniques des ordinateurs portables, 12.970,25 kilos ont été collectés depuis 2018.
Dans les ateliers de la fondation, un important stock meuble le décor en ce mois de mai 2021. Les déchets électroniques de toutes sortes sont triés et classés par type. Au tout début de son activité, la structure avait opté uniquement pour la collecte des déchets de téléphone, à présent nous confie Mouamfon Mama, coordinateur des programmes de la FCTV, l’activité a été répandue vers d’autres composants: des écrans LCD, des tablettes ou des consoles de jeu.
«La prolifération des autres types de déchets et notre détermination pour la protection de l’environnement nous ont poussés à élargir l’activité autour des déchets issus des autres appareils électroniques», renseigne-t-il.
Ces déchets issus des terminaux mobiles et leurs accessoires sont, poursuit Mouamfon Mama, exportés et recyclés en France par l’ONG française Emmaüs International, à travers sa branche dénommée Ateliers du bocage (ADB), spécialisée dans le recyclage pour le réemploi de matériaux informatiques, de téléphones portables et de cartouches d’encre.