AccueilThink tankLa PME africaine face à l’entrepreneuriat de «subsistance»

La PME africaine face à l’entrepreneuriat de «subsistance»

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(BFI) – Plus de 90% du secteur privé formel et près de 70% de la création d’emplois ! Voici ce que représentent, en moyenne, les petites et moyennes entreprises aujourd’hui dans les pays émergents. Ces chiffres éloquents démontrent que l’essor des classes moyennes et la lutte contre la pauvreté sont, et ont toujours été, intimement liés au développement de l’écosystème entrepreneurial local et ce de manière quasi-universelle.

En conséquence, la conception et le pilotage de programmes d’accompagnement efficaces et pragmatiques, destinés à faire émerger les PME, constitue une véritable priorité en vue de l’émergence économique de l’Afrique subsaharienne.

Quid de la situation à date sur ce sujet dans nos pays ?

A titre d’exemple, en République Démocratique du Congo, une étude réalisée en novembre 2019, par le consortium «Deloitte-Target», a cartographié un total de 2 374 « MPME » (micro, petites et moyennes entreprises) formalisées dans les quatre principales villes. Plus de quatre-vingt pour cent réalisaient moins de dix mille dollars de chiffre d’affaires annuel… 

C’est malheureusement fort peu pour un pays dont la superficie équivaut à quatre-vingt fois celle de la Belgique et dont le potentiel de développement est reconnu unanimement depuis de nombreuses décennies.

Sous l’égide de certains bailleurs de fonds internationaux, des programmes de structuration, plus connus sous le vocable d’incubation, se sont développés en Afrique subsaharienne depuis une quinzaine d’années. Même s’il convient de saluer sans ambiguïté ces initiatives, force est de constater qu’un fort déséquilibre subsiste entre l’offre et la demande d’emploi sur le continent et que le chemin est encore particulièrement long.

Ainsi, la Banque Africaine de Développement évalue entre dix et vingt millions le nombre de jeunes intégrant chaque année le marché du travail en Afrique. Seuls trois millions de postes dans l’économie formelle y seraient disponibles selon ses estimations.

Voici, en fonction de mon expérience, quelques pistes pour améliorer l’efficacité des dispositifs de renforcement de capacités visant nos PME :

Augmenter la durée des programmes d’incubation et d’accélération. 

Compte tenu de la complexité de nos environnements professionnels au sud du Sahara, impacter durablement l’organisation d’une « startup », d’une « TPE » ou d’une PME dans un laps de temps très court (quelques semaines ou quelques mois) ne me semble pas réaliste, surtout à raison de quelques heures hebdomadaires de « coaching » ou de mentorat.

Prioriser les fondamentaux de l’entreprise

Plutôt que de chercher, à tout prix, à adresser simultanément l’ensemble des problématiques auxquels une PME est confrontée, il me parait plus pertinent de recentrer, au moins dans un premier temps, le contenu de l’accompagnement sur les fondamentaux de l’entreprise. La définition d’un modèle économique viable, la mise en place d’un suivi de trésorerie et d’une comptabilité rigoureuse, ainsi que la maîtrise de l’offre de produits et services (avantages concurrentiels, cibles, canaux de distribution etc.) devront donc faire l’objet des premières attentions.

Inciter le fondateur ou la fondatrice à se forger une vision à long terme cohérente.

Incontestablement, un entrepreneuriat de «subsistance», guidé par des considérations alimentaires bien compréhensibles, prédomine au sud du Sahara. Certains porteurs de projets tentent de saisir, en vain, des opportunités commerciales, sans avoir nécessairement les outils pour en apprécier la pertinence et qui peuvent s’avérer fort chronophages et onéreuses, car sans rapport avec le cœur de métier initial de l’entreprise ou particulièrement inadaptées aux moyens dont ils disposent.

Diversifier ses activités oui, mais se disperser non !

En conclusion, l’ensemble de ces points contribuerait, j’en suis persuadé, à rendre davantage « investissables » nos PME et, par conséquent, permettrait de régler au moins partiellement la problématique cruciale de leur accès aux financements.

L’établissement d’un lien récurrent entre le contenu de ces programmes d’accompagnement et le financement constitue, selon moi, l’un des principaux leviers à actionner. Cela faciliterait la prise de participation minoritaire au capital de nos entreprises par des « business angels » et par des fonds d’investissements de plus en plus attentifs aux perspectives économiques positives de l’Afrique. 

Notre écosystème entrepreneurial pourrait ainsi bénéficier de l’appuide partenaires, apportant à la fois financement à long terme et création de valeur durable.


*A propos

Christian Kazumba est un expert dans le développement du secteur privé subsaharien. Travaillant depuis onze ans sur le continent africain, son parcours lui a permis d’évoluer successivement au Maroc, au Mali, au Burkina Faso, au Togo et en RD Congo, à des postes de Direction opérationnelle ou générale, dans des entreprises du secteur des services. Il a également piloté, pour le compte d’un « Big Four » en RDC, un projet Banque Mondiale visant à mettre en place des centres de PME à Kinshasa, Lubumbashi, Goma et Matadi. Il dirige aujourd’hui un cabinet de conseil et d’investissement, implanté au Gabon, ciblant principalement l’essor de l’écosystème entrepreneurial.

Rédaction
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