(BFI) – Discrète et innovante, Carole Mbessa Elongo, entrepreuneur Camerounaise et directeur général adjoint de Business Facilities Corporation (BFC), est un réservoir de compétence devenue le bréviaire de tous ceux qui aimerait investir au Cameroun. Les principales pages de sa vie se sont inscrites au Conservatoire national des arts et métiers et à l’université de Nantes en France où elle est diplômée en gestion des entreprises et des administrations. Dans cette interview exclusive faite pour International Leader, elle s’exprime sur l’évolution de l’environnement des affaires au Cameroun, les moyens d’accompagnement de BFC à l’installation, la croissance et le développement des investisseurs internationaux au Cameroun.
Selon le dernier classement Doing Business de la Banque mondiale, l’environnement des affaires continue à s’améliorer en Afrique malgré le ralentissement du rythme des réformes. Peut-on dire qu’il était temps ?
L’Afrique a depuis longtemps pris la mesure de la nécessité d’un cadre structuré pour une pratique efficiente du business. Mais comme partout ailleurs, la mise en place des réformes prend du temps et l’implémentation de celles-ci est progressive. Il est normal qu’après quelques années, l’impact des réformes entreprises commence à se faire ressentir sur le champ des opérations et que les indicateurs tendent à rassurer sur la dynamique en cours ; ceci malgré le léger ralentissement perçu, probablement dû à l’actualité liée à la pandémie que subit le monde depuis bientôt 2 ans et, qui impose que l’on prenne le temps d’appréhender toutes les répercussions des actions posées. Les réformes déjà mises en œuvre doivent également être parfaitement intégrées dans les écosystèmes, on doit en évaluer l’impact et ajuster au besoin.
Les réformes supposent parfois des pertes de recettes pour l’Etat central, qui en les mettant en place sait pouvoir les récupérer sur le long terme, avec les bénéfices tirés de effets celles-ci. Mais dans des contextes instables, à l’exemple de ceux sécuritaires de la zone CEMAC, une perte de recettes peut vouloir dire moins de marge de manœuvre sur la capacité à assurer le contrôle sur la sécurité du pays. Il existe également les freins liés aux contingences politiques nourris par les paradigmes relatifs aux questions de renouvellement des systèmes et classes politiques dans certaines zones.
De toute évidence, il est important de garantir une bonne intégration des mesures par tous les acteurs, de s’assurer que dans leur élaboration l’on tienne également compte du contexte particulier de l’Afrique, de ses spécificités, ainsi que de sa culture. Les réformes étaient indispensables pour intégrer la communautarisation des pays en régions économiques. Sans la mise en œuvre de certaines réformes il était impossible par exemple d’opérationnaliser la Zone de Libre Echange Continentale Africaine qui, si elle est bien exploitée, agira comme un levier de développement très important pour l’Afrique.
Le Rwanda a continué d’améliorer son climat des affaires, notamment en permettant aux jeunes entreprises d’être exemptées d’impôts les deux premières années. Trouve-ton également ce type d’incitation au Cameroun ?
Le Cameroun n’a pas attendu pour faire évoluer son cadre en matière de pratique des affaires. Cela fait plus d’une décennie que plusieurs réformes incitatives ont été mises en place, notamment pour l’entrepreneuriat des jeunes et des femmes.
Une partie de ces mesures est régulièrement issue des recommandations émises par les acteurs du développement dans la plateforme d’échanges annuelle Cameroon Business Forum présidée par le Premier Ministre Chef du Gouvernement et, leur mise en œuvre ainsi que leur impact sur la pratique des affaires sont évalués lors des réunions du comité dédié et du forum annuel. Le Cameroon continue ainsi à optimiser son cadre des affaires et, à l’arrimer aux standards attendus par tous les acteurs pour permettre une libération de toutes les énergies créatrices.
Par exemple, pendant de nombreuses années les entreprises camerounaises nouvellement créées étaient exonérées de la Patente pendant 2 ans. Aujourd’hui cette disposition est passée à 1 an, mais dans le même temps il y a eu la réduction du capital social minimal pour la création des SARL de 1million de FCFA à 100.000FCFA, et il n’y a plus d’obligation à passer chez le notaire pour les créer. Toutes ces mesures ont un impact considérable sur le coût de création d’une entreprise et permettent aujourd’hui à plusieurs entrepreneurs de se lancer. Des orientations ont également été prises très récemment en vue de réduire la pression des agents du fisc sur les entreprises, notamment en limitant le nombre de contrôles.
Créé en 2015, Business Facilities Corporation (BFC) soutien le développement et la croissance des entreprises. En quoi consiste votre accompagnement ?
Notre entreprise a été créée pour accompagner tous les acteurs du développement, en mettant à leur disposition des solutions et outils à même de leur permettre d’accroître leur productivité.
Nous sommes guidés par la vision d’une Afrique totalement intégrée, avec un développement inclusif, tenant compte de nos spécificités et s’appuyant sur notre culture comme levier principal pour le développement. Nous avons pour ambition de transformer totalement les environnements dans lesquels nous nous déployons : transformation positive et inclusive.
Nous avons 5 domaines d’activités stratégiques opérationnels, et plusieurs pôles de compétences structurés en marques de l’entreprise pour accompagner les acteurs. Dans ces marques nous développons des solutions et process d’optimisation de la performance et de la productivité de nos partenaires.
Pour une entreprise européenne qui souhaite s’installer au Cameroun en passant par vos services, quelle serait votre valeur-ajoutée ?
Nous avons une marque dénommée SMARTOFFICE, dédiée particulièrement à l’accompagnement total des acteurs venant de l’étranger et, qui se déploie en synergie avec les 5 autres marques de l’entreprise de manière à délivrer un service complet. Nous avons une bonne connaissance de l’environnement des affaires au Cameroun, ce qui nous permet d’identifier rapidement les positionnements à adopter par nos clients pour un déploiement efficace. Nous avons en interne toutes les expertises support requises pour les accompagner, ce qui représente également un gain de temps.
Nous pouvons réaliser une analyse micro-business qui permet des proposer les scénarii les mieux adaptés aux besoins du partenaire, et d’optimiser la valeur ajoutée dans son segment.. Nous couvrons des aspects tels que : analyses et études d’implantations ; représentation du partenaire dans toutes les instances et prise en charge des aspects relations publiques ; exécution pour son compte de toutes les démarches requises en vue d’apporter des solutions concrètes à son besoin ; conseil sur les aspects administratifs ; fiscaux et juridique garantissant une bonne intégration dans l’environnement des affaires camerounais ; accompagnement dans la réalisation des infrastructures.
Être une jeune, femme et chef d’entreprise à succès n’est certainement pas quelque chose d’habituelle en Afrique. Comment la nouvelle génération (notamment les jeune filles) peuvent-elles s’inspirer de votre parcours ?
Les africaines sont dynamiques. Elles représentent 48% des dirigeants de Pme selon une étude menée par la BAD et l’OIT. Elles relèvent de grands challenges. Ce n’est donc pas inhabituel de rencontrer des femmes chef d’entreprises en Afrique, notamment parmi les jeunes qui sont de plus en plus réceptives aux sensibilisations sur la nécessaire autonomisation des femmes.
Seulement peu jusqu’à récemment communiquaient sur leurs accomplissements, certainement les résidus des aspects de notre culture et des prismes sur les femmes qui empêchaient leur mise en lumière. D’un autre côté les points de contacts avec un auditoire n’étaient pas aussi nombreux qu’actuellement ni accessibles au plus grand nombre. Cet état des choses à certainement entrainé un problème de référant pour les plus jeunes en quête de Roles Models desquels s’inspirer pour se réaliser.
Mais beaucoup de femmes communiquent davantage sur leurs accomplissements notamment à travers des conférences. Pour ma part, je communique régulièrement sur mes activités à travers ma page LinkedIn où me suivent plusieurs jeunes. Je participe également, autant que possible, aux conférences sur les thématiques qui m’interpellent. Ces activités sont l’opportunité d’échanges avec plusieurs jeunes. Je fais également du mentorat de jeunes à travers une association que j’ai créée il y a 3 ans.