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Anthony Same (ST Digital) : « le cloud est devenu une ressource aussi essentielle aux entreprises que l’électricité »

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(BFI) – Après avoir travaillé pour de grands groupes internationaux du numérique (Oracle, SAP, Microsoft, IBM…), l’informaticien camerounais a créé en avril 2017 ST Digital. Basée à Douala, l’entreprise de services informatiques est aujourd’hui implantée dans quatre autres pays d’Afrique centrale et de l’ouest (Togo, Bénin, Côte d’Ivoire et Congo). Le fournisseur des services cloud a par ailleurs inauguré son premier datacenter en janvier dernier. Objectif : réduire la dépendance des entreprises africaines vis-à-vis de l’extérieur. Un investissement tombé à pic au regard de l’explosion de la demande locale des services cloud observée depuis le début de la pandémie de Covid-19. État du marché des services cloud au Cameroun, positionnement de l’entreprise, ultra-domination des GAFAM, souveraineté numérique…

Quel est l’État des lieux du marché des services cloud au Cameroun ?

Le Cameroun comme la plupart des pays d’Afrique de l’ouest et du centre a d’abord découvert les offres de services cloud au travers des grands acteurs mondiaux du cloud public international que sont Microsoft, Amazon, Google. Depuis quelques années seulement, émergent des acteurs de services cloud 100% camerounais comme ST Digital qui commencent à proposer des services cloud tant sur la partie IAAS (Infrastructure as a service — mise à disposition d’infrastructure informatique) que SAAS (Software as a service — mise à disposition de service logiciels).

Quelle part de marché contrôlez-vous et quels sont vos objectifs à court et à moyen terme ?

Dans le contexte d’un marché qui n’en est qu’à ses balbutiements, il est difficile de mesurer nos parts de marché. Ce qui nous importe aujourd’hui, c’est que des acteurs de référence du monde bancaire ou de celui de l’industrie ont confiance en nous et hébergent leurs services et leurs données chez nous. Notre objectif à court terme est d’atteindre un taux de remplissage de 100% sur notre première infrastructure de Bonanjo (à Douala, NDLR). À moyen terme, il est question de devenir un acteur régional en bâtissant d’autres infrastructures notamment en Côte d’Ivoire et au Togo.

Selon de nombreux experts, la demande de services cloud a explosé en Afrique avec la pandémie de Covid-19 ? Observez-vous la même chose au Cameroun ? Vos parts de marché ont-elles augmenté de ce fait ?

Le cloud est devenu une ressource aussi essentielle aux entreprises que l’électricité. La pandémie de Covid-19 nous l’a montré avec l’explosion de la demande pour des services d’hébergement externalisés souvent pour faire face aux restrictions liées aux mesures sanitaires.

Il faut bien comprendre que le cloud est, par construction, plus résilient que l’informatique classique et permet donc de répondre plus facilement aux cas d’urgence. Que ce soit pour provisionner en urgence des serveurs pour un portail de gestion des résultats de test Covid, mettre en place des outils pour la continuité de l’activité (télétravail, signature électronique…), nous avons été sollicités sur une très large variété de projets au Cameroun et cela nous a permis d’afficher une croissance importante en 2020 et 2021.

Vous vous présentez comme le seul acteur « indépendant » à posséder un datacenter aux normes et standards internationaux en Afrique centrale. Vis-à-vis de qui ou de quoi êtes-vous indépendant et en quoi vos concurrents (MTN, Orange, Camtel…) le sont-ils moins ?

Nous sommes ce que l’on peut appeler un pure player et spécialiste du cloud, sans activités dans d’autres domaines pouvant faire concurrence à ses clients. Un opérateur télécom, de nos jours, est un potentiel conçurent d’une banque, alors comment lui garantir l’indépendance ? Chez ST Digital nous n’avons pas ces problèmes.

Par ailleurs, nous sommes une entreprise de droit Camerounais, détenue par des actionnaires camerounais, sans obligation vis-à-vis d’une maison mère. Nos décisions sont prises localement sans dépendre d’une entité à l’étranger ou d’un actionnaire étatique.

Mais tout cela ne garantit pas forcément une meilleure qualité de service… En quoi est-il plus avantageux, de ce point de vue, de confier ses données à un acteur « indépendant » ?

À l’image de Liquid Telecom en Afrique du Sud qui a externalisé son activité datacenter au sein de la société Africa Data Centres, un consensus se dégage dans le secteur pour dire que le modèle organisationnel « neutre/indépendant » est plus efficace tant en interne qu’en externe.

En effet, être indépendant permet de mieux faire face à des problématiques de SLA (Service Level Agreement —engagement de services) de par l’ouverture sans contrainte à de nombreux fournisseurs de services tiers. Pour illustrer cela, chez ST Digital nous avons plus de 6 fournisseurs d’accès internet, ce qui nous permet en cas de panne sur un des réseaux de basculer sur l’autre. Similairement, d’un point de vue contractuel, nos clients peuvent conserver leurs accords avec leurs opérateurs historiques et migrer vers le cloud en toute transparence et en toute flexibilité.

À votre avis, quelle est la part de marché des services cloud contrôlé par les fournisseurs locaux ?

Aujourd’hui, la part de marché des services cloud contrôlée par les fournisseurs locaux est insignifiante en comparaison de l’ultra-domination des GAFAM (Google, Amazon, Facebook, Apple, Microsoft). Cela est dû au fait que l’offre est très récente. Nous pensons que l’avenir est à la construction d’offre hybride ou un acteur local va à la fois utilise le cloud public international et des solutions de cloud privé national comme la nôtre.

Avec une législation quelque peu obsolète en matière de protections des données et une absence de normes locales en matière de datacenter, les acteurs basés au Cameroun présentent-ils les mêmes garanties de sécurité, de qualité de service et de protection de données que les GAFAM ?

Chez ST Digital, nous croyons que la capacité d’exercer notre souveraineté numérique est la clé pour assurer la liberté des utilisateurs de nos services. Un cloud souverain, c’est avant tout un cloud fourni par un prestataire qui s’engage à ne faire aucun usage des données de ses clients. Cet engagement fait intrinsèquement partie de la proposition de valeur de ST Digital.

Sur les aspects normatifs nous opérons une infrastructure de type Tiers 3 aux standards internationaux dans ses aspects de sécurité, redondance et de haute disponibilité. Similairement, nos clauses contractuelles et normatives sont bâties autour des exigences des réglementations RGPD (réglementations sur la gestion des données personnelles) des pays plus avancés et actuellement en étude par le législateur camerounais.

Pour rester dans le même registre. Vous affirmez régulièrement qu’« il est important de préserver la souveraineté de nos données stratégiques ». En quoi est-il dangereux que les informations et services informatiques de la plupart des grandes entreprises du pays transitent par des serveurs étrangers ?

La souveraineté des données dans le cloud c’est un enjeu pour tous, pas seulement en Europe. La souveraineté numérique peut être définie comme la capacité d’un État à pouvoir maitriser l’ensemble des ressources numériques, tant d’un point de vue économique que social et politique, affranchi de tiers ou d’influences extérieures. En somme, avoir une liberté de choix et être moins dépendants des infrastructures, plates-formes ou points d’accès à internet non africain. Et la souveraineté des données, quant à elle, étend cette notion aux organisations. Elle détermine leur capacité à protéger leurs données d’éventuelles interférences notamment étrangères et donc à agir de manière indépendante en particulier dans des domaines stratégiques à leur développement.

Nous sommes aujourd’hui dans un contexte de concurrence mondialisée et de croissance exponentielle des volumes de données sensibles et stratégiques utilisées dans le cloud. Les risques d’actions d’intelligence économique et d’ingérence via des dépendances non maitrisées avec certains de leurs fournisseurs de services cloud sont maintenant reconnus. Ceux-ci font peser un risque à la fois sur la protection des données et sur la capacité à développer de grands acteurs africains.

N’est-ce pas en poussant cette logique à l’extrême que beaucoup d’entreprises hésitent à externaliser la gestion et le stockage de leurs données ?

On a encore beaucoup de personnes qui sont attachées à la propriété et aime posséder leur infrastructure, mais chacun son cœur de métier ! En externalisant la gestion de votre SI, vous confiez votre informatique à un expert informatique. Les problématiques quotidiennes liées à l’informatique passent en arrière-plan car il y a toujours quelqu’un pour veiller à son bon fonctionnement (grâce au monitoring notamment) et pour faire preuve de réactivité en cas d’incident. Résultat ? Vous n’avez plus qu’à vous concentrer sur votre cœur de métier à vous ! Plus de tracas inutiles, il n’y a plus qu’à développer votre activité.

Par ailleurs, souveraineté et hybridité (solutions nationales et internationales) n’est-ce pas un peu contradictoire ? Est-ce pour ne pas renier votre trajectoire personnelle et éviter de contrarier certains de vos partenaires comme Microsoft que vous adoptez cette position un peu d’entre-deux ?  

L’approche hybride est une approche consensuelle qui permet d’avoir le meilleur des deux mondes. Techniquement, elle permet de conserver les données localement tout en exploitant les services cloud de dernières générations de leaders mondiaux comme Microsoft. C’est par exemple le choix du gouvernement sud-africain qui offre des services publics en ligne associant des données hébergées dans un datacenter local et l’utilisation de la plate-forme Azure de Microsoft. Nous sommes très complémentaires et fiers d’être à la fois un des plus importants Gold Partner Microsoft sur nos zones de couverture et opérateur de services cloud 100% africain.

N’est-il pas risqué d’externaliser la gestion et le stockage de ses données dans un pays qui a souvent des problèmes de connexion et où internet peut être coupé comme on l’a vu par le passé ?

ST Digital propose une offre unique avec une connectivité multi-operateurs afin de garantir un accès permanent aux ressources hébergées au sein de notre datacenter. De plus en réponse aux ruptures de câbles sous-marins ou coupures internet nous sommes en train de mettre en place un point d’échange internet local qui permettra aux internautes camerounais d’accéder aux ressources hébergées au Cameroun rendant ainsi les services de nos clients hébergés en local totalement accessible.

Investir au Cameroun

Rédaction
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Média multi-support édité par l’Agence Rhéma Service, cabinet de communication et de stratégie basé à Douala, Business & Finance International regroupe des partenaires internationaux issus du monde des médias, des affaires et de la politique, mus par la volonté de fournir une information vraie, crédible et exploitable pour un investissement sûr en Afrique.

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