(BFI) – Sur la coopération monétaire entre la France et les six pays de la CEMAC, il est une certitude : elle va évoluer. C’est sur le nouveau contenu de ce « partenariat » que la banque centrale (BEAC) travaille actuellement. Cette mutation en cours, obéit à des préalables et devra être bâtie sur des piliers. Les scénarii de réforme pour le franc CFA d’Afrique centrale est le thème sur lequel a exposé le Dr Dieudonné Mignamissi, enseignant-chercheur à l’université de Yaoundé II-Soa.
Une fois la décision actée par le politique, vient la phase de concrétisation. Là, l’universitaire recommande trois choses. Premièrement, que les Etats, définissent et mettent en place un ensemble de critères de convergence, des indicateurs économiques à l’instar du taux de croissance, du taux d’inflation, du ratio de la dette sur le produit intérieur brut (PIB), entre autres qui devront être respectés par tous. Deuxièmement, la rationalisation des communautés économiques régionales (CER), notamment la CEMAC et la CEEAC pour le cas d’espèce. En étant membre d’une seule communauté économique régionale, les pays pourront gaspiller moins de ressources. Troisièmement, la définition des objectifs à atteindre à partir d’un programme économique de base acceptée de tous.
Les piliers
Ils sont au nombre de six. La fin de la centralisation des réserves au Compte d’opérations du Trésor français. Au-delà des intérêts que produisent les dépôts sur ledit compte, il a émergé des échanges qu’il serait plus bénéfique aux Etats de disposer des ressources qui y sont stockées actuellement, au lieu d’attendre la rémunération, pour mieux faire face aux chocs qui pourraient survenir. S’agissant du statut et de la maîtrise de la monnaie, autre pilier de la réforme, il s’agit d’arriver à une monnaie qui aide à résoudre les problèmes macro-économiques. Egalement concerné, la refonte de la BEAC, la banque centrale actuelle. Il faudrait repenser ses missions, définir son statut et même le profil du gouverneur. C’est la question de l’indépendance de l’Institut d’émission qui en jeu ici. S’agissant du régime de change, qu’il soit fixe comme c’est le cas actuellement ou flexible pour les économies gérant leur monnaie, l’un et l’autre système offre des avantages et des inconvénients. Choisir d’arrimer la nouvelle monnaie à un panier de devises (euro et autres) est une piste à étudier. Incidemment, la politique monétaire et la politique de change devraient être revues. Le développement des marchés financiers n’est pas en reste, pour porter les investissements de long terme.
Les scénarii et garanties de la réforme
Faut-il réviser ou annuler les mécanismes de fonctionnement de la zone Franc ? Dieudonné Mignamissi déroule cinq voies possibles à emprunter par la sous-région : le statu-quo, l’agrégation, la coopération, la consolidation et l’ouverture de la CEMAC sur la CEEAC. Deux approches concurrentes s’affrontent. Une approche endogène ou dynamique de la monnaie unique que l’universitaire partage. Ou alors, une approche exogène ou statique de la monnaie. Qu’importe, la réforme devra apporter des garanties : le changement de nom, c’est-à-dire la fin de l’appellation franc CFA pour désigner cette nouvelle monnaie commune. La gouvernance monétaire portée par une élite formée et capable de mener le projet à bon port, tout écart étant susceptible de mener à la dérive. La relation entre la future banque centrale et les gouvernements. La cohabitation entre la politique monétaire centralisée et les politiques budgétaires décentralisées. Et enfin, des structures économiques résilientes et capables de soutenir la monnaie unique.
André Noir