(BFI) – En effet, cette pandémie n’a pas épargné les approvisionnements, avec un impact sur les prix des matières premières. Ce qui a renchéri les prix sur le marché. Ces prix concernent principalement les produits de grande consommation. De nombreux Camerounais se demandent alors si l’importation de ces produits est une contrainte. En effet, ils représentent plus de moitié des importations alimentaires pour près de 600 milliards. Considéré comme le grenier d’Afrique centrale, le Cameroun dispose pourtant du potentiel pour produire plus.
Le riz
C’est l’un des aliments les plus consommés au Cameroun. Sa consommation mensuelle est de 47 000 tonnes. Son importation annuelle coûte en moyenne 160 milliards de Fcfa. Au niveau de la demande nationale, elle est d’à peu près 600 000 tonnes, alors que le pays n’en produit que la moitié. Pourtant, il ne manque pas de terres au Cameroun pour sa culture. Encore moins de l’eau pour assurer de bonnes récoltes. Les importateurs devaient continuer de couvrir la demande pour ne pas exposer le pays à un risque de pénurie. Avec le Covid-19, ils ont fait face à plusieurs difficultés. D’après Jacquis Kemleu, secrétaire général du groupement des importateurs de riz, il n’y a pas d’autre solution que de densifier la production locale. Ces derniers se disent d’ailleurs disposés financièrement à accompagner ce chantier si les terres sont disponibles, ainsi que des engrais et semences de bonne qualité. Et les initiatives locales manquent pas. Il serait donc temps de les booster car, la situation ne va pas en s’arrangeant. Dans sa récente note sur le commerce extérieur au Cameroun, l’Institut national de la statistique révèle qu’au premier semestre 2021, le pays a importé 319 330 tonnes pour un montant de 86 milliards de Fcfa. Plus que les 260 292 tonnes exportées en 2020, pour 70,9 milliards de Fcfa.
Poisson
La demande nationale annuelle de poissons est de 550 000 tonnes. D’après le ministère de l’Elevage, des Pêches et des Industries animales (Minepia), elle ne peut être satisfaite par les pêches de capture. En effet, leurs productions cumulées à celles de l’aquaculture sont estimées à 335000 tonnes, dont 9100 tonnes pour l’aquaculture. Les importations viennent couvrir cette demande avec à peu près 185 000 tonnes. Des quantités qui pourraient être réduites. L’année dernière, dans ce dessein, le Minepia lançait un appel à manifestation d’intérêt des opérateurs économiques nationaux et/ou étrangers pour des investissements dans la filière aquacole. Cela éviterait la dépendance actuelle qui fait qu’on frôle les remous sociaux lorsque les prix finaux augmentent. Côté du Minepia, les initiatives et soutiens aux acteurs locaux sont à multiplier pour développer davantage l’aquaculture.
Huile de palme
En 2021, le Cameroun va importer à peu près 120.000 tonnes d’huile de palme du fait de l’insuffisance de la production locale. En effet, la production nationale se situe à 340 000 tonnes pour un besoin d’à peu près 500 000 tonnes par an. Soit un déficit de 160 000 tonnes. C’est que le secteur ne fait pas courir. De plus, il y a régulièrement des difficultés d’approvisionnement. Rareté des terres, mauvaise qualité des semences, exportations pas toujours contrôlées, coût élevé des engrais, etc. sont quelques freins rencontrés par les acteurs qui s’investissent dans ce secteur. « Ceux qui s’engagent dans ce domaine font défaut. Si j’avais un appel à lancer, je demanderais à ceux qui ont un peu de moyens d’investir dans le secteur du palmier à huile. On devrait booster le secteur palmier à huile. Pourquoi ne pas le subventionner comme cela se fait sous d’autres cieux », indique Daniel Ze Bekolo, producteur d’huile de palme. Jusqu’ici des initiatives mises sur pied n’arrivent pas à tenir les promesses des fleurs. Il s’agit, entre autres, de l’entreprise Pamol Plantations PLC, au ralenti du fait de la crise sociopolitique dans la région du Sud-Ouest, ainsi que du Projet d’amélioration de la productivité et de la compétitivité de la filière palmier à huile.
Lait et produits dérivés
Le potentiel est là. Mais, les retombées ne suivent pas. Le lait et les produits dérivés font en effet partie des produits que le Cameroun continue d’importer. Le déficit est évalué à environ 120 000 tonnes par an et de nombreux milliards dépenser pour importer, bien que la production se soit accrue de 7% depuis 2014, pour s’établir à près de 275 000 tonnes en 2019. Après des initiatives infructueuses pour relever la tendance, le Minepia a récemment mis en œuvre une nouvelle stratégie. 165 vaches laitières à haut rendement ont été importées de France par le Projet de développement de l’élevage (Prodel) financé par la Banque mondiale, pour aider à booster la production laitière locale. Il faudra donc miser sur cette initiative, mais aussi développer d’autres techniques modernes.
Blé et maïs
Depuis janvier 2021, le prix du sac de farine de blé a augmenté deux fois. Jusqu’ici, le prix final des produits, notamment le pain, n’a pas connu une hausse. C’est que le gouvernement, les meuniers et les autres acteurs de la chaîne poursuivent des concertations pour baisser les prix. Le Cameroun continue d’importer massivement le blé depuis la faillite de Sodeblé. En 2020 par exemple, le pays a importé 860 000 tonnes, contre 830 000 tonnes en 2019. Le quota fixé en début d’année était de 900 000 tonnes. Actuellement, des initiatives sont prises à l’Institut de recherches agricoles pour le développement (Irad) pour développer des variétés de céréales. En 2019, la ministre déléguée auprès du ministre de l’Agriculture et du Développement rural indiquait d’ailleurs que le Cameroun dispose de plus de 200 parcelles d’expérimentation de la culture du blé. « Quatre variétés sont sorties du lot. La prochaine étape consiste à les observer pendant un ou deux ans, puis de sélectionner définitivement celles qui sont adaptées à chaque zone agro-écologique », précisait-elle. Le maïs n’échappe pas non plus à cette réalité. La demande nationale est d’un peu plus de 2,8 millions de tonnes, mais le Cameroun n’en produit pas autant. En 2019, le pays a produit 2,3 millions de tonnes. Ce qui ne permet pas de satisfaire les besoins des industriels, des ménages et des éleveurs. Tous se sentent contraints d’importer.
Placide Onguéné