(BFI) – L’industrie aéronautique africaine cherche des moyens de se rétablir après avoir subi plus de 6 milliards de dollars de pertes dues à la pandémie.
Les voyageurs fréquents en Afrique s’accordent à dire que le coût des billets d’avion est trop élevé. Ce problème est si grave que les principales parties prenantes du secteur de l’aviation en Afrique se sont réunies virtuellement au début de l’année pour discuter des facteurs responsables du coût élevé des billets d’avion et pour formuler des suggestions sur la manière de traiter ces facteurs.
Lors d’un séminaire en ligne organisé par l’African Aviation Industry Group (AAIG) sur le thème « Achieving Affordable Air Transport Across Africa (Réaliser un transport aérien abordable à travers l’Afrique, tdlr) », les experts du secteur ont déclaré que les coûts élevés des billets d’avion résultent de la convergence de multiples facteurs, notamment le coût des marchandises vendues, les coûts intermédiaires, les taxes gouvernementales, les charges réglementaires, le moment de l’achat (les options de réservation anticipée ont tendance à être moins chères), les coûts du carburant, les forces du marché de l’offre et de la demande, et les coûts liés aux fabricants d’équipements originaux. Ils ont également identifié les problèmes de sûreté et de sécurité, la faible connectivité intra-africaine, les limitations d’accès au marché et l’insuffisance des infrastructures comme quelques-uns des défis auxquels l’industrie est confrontée.
Le secrétaire général de la Commission africaine de l’aviation civile, Tefera Mekonnen Tefera, a noté que le secteur de l’aviation était sérieusement surtaxé et surchargé par des charges et des frais élevés, rendant ainsi les voyages en avion inabordables dans la plupart des régions d’Afrique.
M. Tefera a ajouté : « Outre les redevances aéronautiques et les taxes gouvernementales, les compagnies aériennes paient également des redevances et des frais supplémentaires pour les installations et les services aéroportuaires auxiliaires, les services de manutention au sol, les services de surveillance et de réglementation des AAC » (autorités de l’aviation civile). « Les compagnies aériennes sont également confrontées au coût élevé du kérosène, mais ce sont les redevances et les taxes prélevées qui ont de loin le plus d’impact sur le prix des billets d’avion en Afrique« , a souligné M. Tefera.
Le coût élevé du kérosène
Les participants au webinaire ont déploré que le kérosène coûte plus cher en Afrique, y compris dans les pays producteurs de pétrole, qu’en Europe ou au Moyen-Orient.
La situation s’est considérablement améliorée ces dernières années, ont-ils reconnu, bien que les compagnies aériennes africaines soient toujours perçues comme peu sûres par rapport à d’autres régions, en raison de facteurs tels que la vétusté des avions, le manque d’entretien des appareils et des infrastructures aéroportuaires de qualité inférieure.
Le directeur général de l’autorité de l’aviation civile du Kenya, Gilbert Kibe, a déclaré que les coûts élevés de l’aviation ont entravé le commerce inter et intra-africain, les voyages d’affaires et de loisirs, ce qui a diminué la compétitivité des produits africains sur le marché mondial.
Outre les redevances aéronautiques et les taxes gouvernementales, les compagnies aériennes paient également des redevances et des frais supplémentaires pour les installations et les services aéroportuaires auxiliaires, les services de manutention au sol, les services de surveillance et de réglementation des AAC (autorités de l’aviation civile). M. Kibe a noté que « l’absence de concurrence due à la mainmise monopolistique des grandes compagnies aériennes a conduit à l’existence de quelques avions qui pratiquent des tarifs équivalents à ceux des voyages vers des destinations européennes. » L’apparition de la pandémie de COVID-19 a aggravé la situation des compagnies aériennes africaines, comme ailleurs dans le monde.
Selon l’Association internationale du transport aérien, qui soutient l’aviation par des normes mondiales en matière de sécurité, de sûreté, d’efficacité et de durabilité, le secteur aérien africain a perdu jusqu’à 6 milliards de dollars l’année dernière à cause de la pandémie.
Le COVID-19 a exacerbé les problèmes séculaires de l’aviation africaine, tels que la connectivité interafricaine limitée, les faibles taux de remplissage, les infrastructures inadéquates, le coût élevé des voyages interafricains et les primes de financement élevées. Pour se rétablir, le secteur de l’aviation a mis en place des mesures renforcées de prévention et de gestion du COVID-19.
Financement des compagnies aériennes africaines
Au cours de la dernière décennie, Afreximbank a organisé plus de 2,5 milliards de dollars de financement pour les compagnies aériennes africaines et dispose toujours d’une facilité active de plus de 200 millions de dollars, indique Oluranti Doherty, directeur du développement des exportations de la banque.
De nombreuses compagnies aériennes ont réduit leurs opérations et leur personnel pour survivre à la pandémie, le coût du dépistage du COVID-19 étant perçu comme une nouvelle taxe sur les passagers.
Les parties prenantes du secteur affirment qu’un redémarrage et une reprise doivent être l’occasion pour l’aviation africaine de s’attaquer aux coûts opérationnels élevés.
Mark Tierney, directeur général de Crabtree Capital, une société de conseil en aviation basée à Dublin, déclare que « si nous voulons sérieusement rendre le transport aérien civil abordable pour la majorité afin de stimuler la croissance économique et le développement, il n’y a que deux façons de le faire : des subventions ou une réduction des coûts unitaires. »
Les subventions ne sont pas au rendez-vous, ce qui fait de la réduction des coûts unitaires la seule option viable qui reste. Pour ce faire, M. Tierney estime qu’il faut cesser de fragmenter le petit marché africain de l’aviation et augmenter au contraire les économies de densité et d’échelle.
Il a observé que le secteur a besoin de matériel spécifique pour les conseils en matière de durabilité et les meilleures pratiques que les industries de l’aviation peuvent adopter.
Une autre solution pour faire baisser les tarifs aériens pourrait être l’intervention réglementaire des gouvernements par l’octroi de subventions, le protectionnisme, l’implication dans le système de la chaîne de valeur, notamment l’achat préférentiel d’équipements vitaux et la propriété d’infrastructures essentielles, ainsi que la mise en place des garanties économiques nécessaires.
Un communiqué publié à l’issue de l’événement indique que « des mesures appropriées doivent être prises par l’industrie aérienne pour améliorer l’efficacité des compagnies aériennes. Ceci a le potentiel de réduire les coûts de sorte que le secteur du transport aérien puisse être rendu accessible et plus abordable pour un plus grand nombre de voyageurs en Afrique. »