(BFI) – L’enveloppe s’inscrit dans une autorisation globale de 200 milliards de Fcfa accordés au ministère des Finances pour faire face à des tensions de trésorerie anticipées entre mai et août, période durant laquelle les recettes fiscales accusent traditionnellement un creux.
Le Cameroun veut ajuster sa stratégie budgétaire afin de répondre à des engagements financiers imminents sur le plan international. Dans le cadre de la révision de la loi de Finances 2025, les autorités ont rehaussés de manière significative l’enveloppe dédié au service de la dette publique, pour y intégrer les coûts induits par une opération de financement externe d’un montant de 100 milliards de Fcfa. Ce prêt de cours terme, structuré avec le concours de la banque française Natixis et adossé à une garantie de la MIGA, l’agence de la Banque mondiale dédiée à l’assurance contre les risques politiques, engendrera des charges supplémentaires estimées à 52,8 milliards de Fcfa.
Pour absorber cette hausse, le gouvernement a arbitré en faveur d’un report partiel du service à la dette intérieure. Selon les propositions contenues dans le document de programmation budgétaire à moyen terme (DPBMT) 2026-2028, cette décision permet de dégager 34,5 milliards de Fcfa. Autrement dit, les paiements dû à certains prestataires, notamment les entreprises nationales, les fournisseurs de l’Etat et les adjudicataires des marchés publics, seront à nouveaux différés.
L’opération, autorisée par décret présidentiel en Mai 2025, consiste en une ligne de crédit d’un an, renouvelable deux fois, octroyé par Natixis et sécurisé par la MIGA. L’enveloppe s’inscrit dans une autorisation globale de 200 milliards de Fcfa accordés au ministère des Finances pour faire face à des tensions de trésorerie anticipées entre mai et août, période durant laquelle les recettes fiscales accusent traditionnellement un creux.
Selon Samuel Tela, directeur de la trésorerie au ministère des Finances, ce recours externe s’expose dans un contexte où l’accès au marché domestique devient de plus en plus contraint, alors que s’intensifie la concurrence avec des besoins prioritaires, comme les subventions dans le secteur énergétique ou le retrait d’un financement américain au Fonds mondial, qui prive l’Etat d’environ 50 milliards de Fcfa.
Ce choix budgétaire s’inscrit dans un environnement marqué par une accumulation continue de la dette intérieure. D’après les données les plus récentes de la Caisse Autonome d’Amortissement (CAA), cette dernière s’établissait à 3 900,2 milliards de Fcfa à fin mars 2025, soit une hausse annuelle de 10,9%. Elle représente 12,1% du PIB, sans inclure les aérés de moins de trois mois ni les crédits de TVA dus au secteur privé.
L’arbitrage en faveur de la dette extérieure n’est pas inédit. En 2024, selon les chiffres consolidés de CAA, seulement 435,5 milliards de Fcfa ont été déboursés pour rembourser pour rembourser la dette intérieure, sur un objectif initial de 826,3 milliards de Fcfa, soit un taux d’exécution de 52,7%. En revanche, le service de la dette exterieure a atteint 942,6 milliards de Fcfa, dépassant les prévisions de 825 milliards de Fcfa.
Cette stratégie reflète une volonté de préserver la réputation financière du pays auprès de ses partenaires étrangers, les engagements internationaux étant soumis à des échéances obligatoires. A l’inverse, les dettes intérieures, notamment les crédits de TVA et les restes à payer aux entreprises, ne bénéficient pas du même cadre contraignant.
Ce n’est pas la première fois que le Cameroun fait appel aux financements extérieurs pour apurer sa intérieure. En Juillet 2024, une opération similaire avait été conclu avec CitiGroup, pour un montant de 323,9 milliards de Fcfa, destinés au remboursement partiel des créances domestiques. Une nouvelle opération du même type est évoquée, alors que le pays tente de manœuvrer dans un environnement financier de plus en plus restreint et couteux.
Lors de la 8e revue des programmes appuyés par le Fonds monétaire international (FMI), en Mai 2025, la problématique du règlement de la dette intérieure avait d’ailleurs été explicitement évoquée. L’institution de Washington aurait encouragé le gouvernement camerounais à engager des mécanismes de financement ciblés pour éviter un enlisement du tissu économique local, déjà fortement affecté par des délais de paiement chronique.