(BFI) – Venu d’ailleurs il y a quelques semaines, le coronavirus nous a frappé de plein fouet. Le monde entier est concerné et doit faire face à cette véritable pandémie. Le Sénégal n’est pas épargné et voit le nombre de cas augmenter tous les jours. La lutte contre le virus s’organise à travers tout le pays : mesures barrières à respecter par tous, mesures d’hygiène, interdiction de rassemblements, distance sociale, confinement, fermeture des écoles, universités et lieux de cultes etc…. Les frontières aériennes et terrestres ont été fermées le 19 mars et l’état d’urgence a été décrété ce 23 mars 2020.
Nous saluons l’ensemble des mesures prises afin de protéger les populations. Néanmoins, elles ont des conséquences directes sur toutes nos entreprises: TPEs, PMEs, PMIs, grands groupes… L’ impact sur le secteur privé et sur l’ emploi est énorme et à prévenir.
Dans ce contexte, en tant qu’acteurs de l’économie sénégalaise, nous souhaitons apporter notre contribution effective à la lutte contre le virus et ses conséquences directes sur l’économie nationale. A cet effet, nous proposons ici des mesures concrètes pouvant être prises par le Gouvernement du Sénégal. En effet, seule une action concertée rapide, audacieuse et efficace réduira les risques à court terme liés à cette pandémie pour les travailleurs et les coûts à moyen et long terme pour les entreprises et l’économie du pays.
Les mesures prises le 21 mars par la Banque Centrale des États de l’Afrique de l’Ouest pour soutenir les économies de la zone UEMOA et permettre de continuer à alimenter le système économique avec des flux financiers conséquents et d’accompagner les entreprises dans cette phase critique de la crise sont un premier jalon important pour la survie de nos économies. Parmi ces 8 mesures phares, citons :
- l’augmentation des ressources financières mises à la disposition des banques à hauteur de FCFA.340 milliards ainsi que des mécanismes de refinancement ;
- la sensibilisation des banques pour une utilisation plus importante des ressources du guichet spécial de refinancement des crédits accordés aux petites et moyennes entreprises (PME/PMI) ;
- l’organisation de reports d’échéances de crédits pour les entreprises, notamment les PMEs et PMIs….
Ces mesures pourraient éviter le manque de liquidités au niveau du système interbancaire.
Toutefois,:
- Nous en appelons à l’esprit de solidarité des banques commerciales afin qu’elles puissent mettre également ces ressources à disposition du système économique et notamment des PMEs et PMIs du Sénégal ;
Nous demandons avec insistance d’assouplir les conditions d’octroi des crédits et de lignes de découverts pendant une période de 3 à 6 mois pour toutes les entreprises afin de pouvoir gérer la crise et envisager plus sereinement la période de reprise de l’activité économique ;
-Nous exhortons la BCEAO à revoir ses taux directeurs afin de mieux dynamiser la mise à disposition de fonds pour le système économique.
En outre, nous incitons le Gouvernement à prendre les mesures suivantes au niveau national :
:
- Sur le plan de la situation économique
- Renforcer le sentiment d’appartenance et de solidarité nationale des populations citoyennes et leur adresser différents messages pour les mobiliser autour des principales valeurs qui nous unissent ;
- Définir cette crise comme un cas de force majeure qui permettra aux entreprises de mettre en place les mesures appropriées de gestion interne. En effet, cette crise sans précédent revêt les caractéristiques définissant un cas de force majeure, à savoir : le caractère extérieur de « l’évènement qui doit échapper au contrôle de la partie qui ne peut plus exécuter ses obligations », le caractère irrésistible de l’évènement « qui ne peut être évité » malgré les efforts fournis pour arriver à l’exécution des obligations du contrat, le caractère imprévisible de l’évènement ;
- Clarifier très rapidement les mécanismes et les procédures opérationnelles de soutien aux familles et aux entreprises afin d’anticiper sur les flux de demandes et de mieux organiser la riposte ;
- Sur le plan des prévisions à court, moyen et long terme
- Établir différents scénarios de crise en identifiant toutes les possibilités et leurs conséquences afin d’anticiper au mieux les actions à mener de manière coordonnée par les différentes structures de l’État. Il pourrait être envisagé au moins trois scenarii en fonction de la durée de la crise : courte (1 mois et demi), longue (3 mois), très longue (plus de 3 mois) ;
- Anticiper la reprise économique et les schémas de sortie de crise afin d’être correctement préparés à toutes éventualités en tant qu’État souverain ;
- Envisager d’élaborer rapidement une Loi de Finances rectificative en fonction des différentes prévisions;
- Sur le plan de la fiscalité
- Reporter les échéances fiscales et sociales afin de soulager les entreprises et d’éviter le risque de faillite : les échéances fiscales et sociales des 3 prochains mois (Impôts sur les Sociétés au 30 Avril puis au 15 Juin 2020, retenues à la source sur les salaires) pourraient être reportées à une date ultérieure à déterminer, en tenant compte de la période de reprise de l’activité permettant aux entreprises de faire face à leurs obligations sociales et de préserver les emplois en fonction des possibilités budgétaires de l’État ;
- Suspendre toutes les procédures fiscales et sociales envers les entreprises, notamment les avis à tiers détenteurs et les redressements fiscaux en cours, en lien avec le point 7 ci-dessus ;
- Sur le plan du soutien financier aux entreprises
- Apurer la dette intérieure de l’État vis-à-vis des entreprises afin de favoriser la circulation des flux financiers et le renflouement de la trésorerie des entreprises;
- Accorder une garantie de l’État aux banques commerciales pour l’assouplissement des conditions d’octroi de crédit en mobilisant notamment les lignes de refinancement de la BCEAO ;
- Prévoir à partir du Fonds de solidarité Force Covid#19, dans le cadre de la lutte contre les conséquences économiques de la pandémie Covid#19, l’allocation de fonds de soutien pour les entreprises existantes via le financement de leur besoin en fonds de roulement sur une fourchette allant de 1 million de Francs CFA jusqu’à 15 millions Francs CFA par entreprise ;
- Mobiliser les expertises requises pour un accompagnement approprié des entreprises notamment pour les demandes de report de charges fiscales et sociales ainsi que de l’accompagnement financier et la prévision d’exploitation et de trésorerie afin de traverser plus sereinement cette période de crise ;
- Sur le plan de la Continuité des Services
- S’assurer en collaboration avec les sociétés concernées de la continuité absolue des services de base : eau, électricité, banques, commerces pour le ravitaillement des populations et notamment téléphone et internet pour assurer un service de qualité et une bande passante suffisante pour permettre le télétravail ;
- Sécuriser tous les processus d’approvisionnement du pays et mettre en place assez de stocks de sécurité pour tenir sur les 6 prochains mois ;
- Favoriser le consommer local et renforcer les capacités de production à cycle court avec un meilleur encadrement des producteurs locaux, notamment ceux pouvant contribuer directement à la production de produits « made in Senegal » qui contribueront à lutter contre le COVID#19. Ces produits pourraient comprendre des fournitures et de l’équipement essentiels à la santé et à la sécurité tels que des équipements de protection individuelle, des produits désinfectants, des produits facilitant les diagnostics et les tests ainsi que le suivi de maladies.
Ces quinze mesures concrètes pourraient contribuer très significativement à amortir le choc de la crise économique liée au COVID#19.
Bien sûr, nous restons entièrement mobilisés et disponibles pour apporter notre contribution dans la mise en œuvre d’actions concrètes dans cette guerre contre la pandémie Covid#19.
Nous nous tenons aux côtés du Gouvernement du Sénégal pour faire face et avancer ensemble vers une reprise économique inéluctable à laquelle il faudra arriver pour redynamiser l’activité entrepreneuriale et dissiper les effets dévastateurs de cette crise sans précédent.
Ensemble, nous vaincrons le Covid#19.
Ndèye Marième FALL est la Présidente Collectifs Entrepreneurs & CEO Cabinet G&G)