(BFI) – Pour la première fois, plus de la moitié de la population mondiale dispose d’une forme de protection sociale, mais les progrès sont beaucoup trop lents, a indiqué jeudi 12 septembre 2024, l’Organisation internationale du travail (OIT).
Dans un nouveau rapport, l’OIT appelle en particulier les pays les plus vulnérables à la crise climatique à investir davantage dans la protection sociale car elle permet, non pas d’empêcher le changement climatique, mais d’en atténuer l’impact sur la population en prévenant notamment la pauvreté.
Selon l’OIT, 52,4% de la population disposait l’an dernier d’une forme ou d’une autre de couverture sociale, un chiffre en hausse par rapport aux 42,8% enregistrés en 2015. « Même s’il s’agit d’une avancée appréciable, il demeure qu’en réalité 3,8 milliards de personnes ne bénéficient toujours d’aucune forme de protection sociale« , déplore l’OIT, qui pointe aussi du doigt le fait que la plupart des enfants (76,1%) ne bénéficient toujours pas d’une protection sociale efficace.
Si les progrès devaient se poursuivre au rythme actuel sur le plan mondial, il faudrait encore 49 ans – jusqu’en 2073 – pour que chaque personne soit couverte par au moins une prestation de protection sociale.
Un rythme que l’OIT juge trop lent
Cette agence spécialisée de l’ONU est particulièrement inquiète pour les pays les plus vulnérables à la crise climatique, alors qu’elle « représente la menace la plus grave pour la justice sociale aujourd’hui« , selon le directeur général de l’OIT, Gilbert Houngbo.
« Bon nombre des pays qui subissent les conséquences les plus brutales de cette crise sont particulièrement mal équipés pour faire face à ses conséquences sur l’environnement et les moyens de subsistance« , a-t-il relevé dans un communiqué.
Dans les 20 pays les plus vulnérables à la crise climatique, 91,3% des personnes (364 millions) ne bénéficient toujours d’aucune forme de protection sociale. Plus largement, dans les 50 pays les plus vulnérables au climat, 75% de la population (2,1 milliards de personnes) ne bénéficient d’aucune protection sociale.
« Ces écarts sont particulièrement importants, étant donné le rôle potentiel de la protection sociale pour atténuer l’impact du changement climatique, aider les personnes et les sociétés à s’adapter à une nouvelle réalité climatiquement volatile et faciliter une transition juste vers un avenir durable« , indique l’OIT dans un communiqué.
« Vitesse supérieure »
Le rapport explique que la protection sociale permet de renforcer la capacité des populations « à résister aux chocs climatiques ex ante en sécurisant les revenus et l’accès aux soins de santé » et contribue à améliorer les capacités d’adaptation, « notamment celles des générations futures grâce à ses impacts positifs sur le développement humain« . Les mesures de protection sociale, lorsque associées à des politiques actives du marché du travail, peuvent aussi aider les personnes à passer à des emplois plus écologiques et des pratiques économiques plus durables, fait également valoir l’OIT.
Le rapport cite plusieurs autres options possibles de contribution de la couverture sociale à l’atténuation du changement climatique, comme par exemple « l’écologisation des fonds de pension publics » ou la conversion des subventions aux combustibles fossiles en prestations de protection sociale.
Pour l’OIT, « il est temps de passer à la vitesse supérieure » et d’investir de manière significative dans la protection sociale, alors que le monde suit deux trajectoires de protection sociale très différentes. Le rapport montre que les pays à revenu élevé se rapprochent d’une couverture universelle (avec un taux de 85,9%) et que les pays à revenu intermédiaire supérieur (71,2%) et inférieur (32,4%) « font de grands progrès pour combler les lacunes de la protection« . Mais au même moment, les taux de couverture dans les pays à faible revenu (9,7%) ont à peine augmenté depuis 2015.
Les pays à revenu élevé consacrent en moyenne 16,2% de leur PIB à la protection sociale, contre 0,8% pour les pays à faible revenu.
Ces pays à faible revenu ont besoin de 308,5 milliards de dollars supplémentaires par an pour garantir au moins une protection sociale de base, selon l’OIT, qui réclame un soutien international pour atteindre cet objectif.
Félix Victor Dévaloix