(BFI) – Dans sa Lettre de la Recherche, la Banque des États de l’Afrique centrale (Beac) traite de la cryptomonnaie sous la plume de Jacques Eloundou Ndeme, chef de service à la direction des systèmes et moyens de paiement de la banque centrale commune au Cameroun, la Centrafrique, le Congo, le Gabon, la Guinée équatoriale, et le Tchad. « Les monnaies numériques de banque centrale sont-elles une réponse face aux cryptomonnaies ? » est la problématique au centre de cet article.
Selon son auteur, l’introduction d’une cryptomonnaie de banque centrale, désignée monnaies numériques de banque centrale (MNBC), peut perturber le système bancaire existant. Cela pourrait se produire si les citoyens décident de détenir de la monnaie numérique au lieu de conserver leur monnaie physique sur un compte bancaire. Cela signifierait que les banques n’auraient pas d’argent pour accorder des prêts et autres produits financiers. Cela pourrait amener les banques à augmenter leurs taux d’intérêt pour inciter les clients à conserver leurs dépôts au sein des banques. Mais alors les intérêts perçus sur les prêts augmenteraient également pour couvrir les intérêts sur l’épargne.
Aussi, indique le chercheur, l’usage d’un portefeuille numérique peut entraîner une défiance pour le compte bancaire. À moins d’accorder l’autorisation aux banques, de gérer les portefeuilles numériques, les populations pourraient ne plus avoir recours aux services de paiement des banques. Cependant, étant donné que la MNBC ne produit pas les intérêts et que la Banque centrale peut imposer des limites de transaction et de solde sur certains portefeuilles, ce risque peut être minimisé.
Risques de sécurité
Le deuxième risque est opérationnel. Car, indique Jacques Eloundou Ndeme, les systèmes informatiques sont susceptibles de tomber en panne ou faire l’objet de cyberattaques. Inévitablement, la MNBC amène à une centralisation ; une situation qui exacerberait les cybervulnérabilités déjà répandues et augmenterait les surfaces et les vecteurs d’attaque, faisant de la banque centrale une cible. Ces attaques peuvent compromettre la confiance des utilisateurs ou pire, conduire à la disparition de la monnaie en circulation. La banque centrale aura besoin d’une technologie robuste et de systèmes de sécurité informatique de niveau militaire.
L’article indique aussi que le risque que la MNBC soit utilisée pour blanchir de l’argent et financer le terrorisme est présent. Car, les institutions financières auraient besoin de systèmes solides pour lutter contre ces menaces, soutenus par une infrastructure juridique nationale. Ainsi, il faut concevoir le système conformément aux lignes directrices visant à empêcher le flux et l’utilisation illicites de fonds. Les mesures prises doivent bien être proportionnelles pour protéger la vie privée des utilisateurs.
Ce dernier point, selon le chercheur, est important, car la MNBC donne un pouvoir de contrôle important à la banque centrale, pouvoir qui va même au-delà de ses missions. En effet, la traçabilité des comptes et des transactions donne la possibilité d’intrusion dans les vies privées. Aussi, en concertation avec les législateurs nationaux, la Banque Centrale, dans la construction de sa MNBC doit définir les métadonnées qu’elle collectera et l’accès à ces données et l’usage qu’il en sera fait. Le risque ici étant celui du rejet de la MNBC par les utilisateurs qui pourraient la trouver trop intrusive.