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«Le port d’Abidjan a fait un grand bond en avant» Hien Yacouba Sié – DG Port autonome d’Abidjan

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(BFI) – Après deux années de pandémie et alors que la guerre en Ukraine perturbe le commerce international, le directeur du port autonome d’Abidjan a accordé un entretien à RFI. Hien Yacouba Sié détaille sa stratégie de modernisation et commente le rachat des activités logistiques du groupe Bolloré par MSC.

Comment le port d’Abidjan sort-il de la période de pandémie qui a fortement perturbé le commerce mondial ?

Malgré le choc de 2020, 2021 a été une année plutôt intéressante pour le port d’Abidjan en termes de trafic. C’est la conséquence de la vitalité de l’économie ivoirienne. Cela s’est traduit par un trafic record de 30 millions en tonnage brut (la marchandise et le contenant), 28 millions en tonnage net, soit une croissance de 12% par rapport à 2020.

Quel produit vous tirent vers le haut et qui sont vos clients aujourd’hui ?

On peut parler d’abord des intrants ciments. Un pays en chantier nécessite beaucoup de matériaux de construction. À cela, il faut ajouter la croissance des exportations de produits agricoles, notamment la noix de cajou. Pour les destinations, la zone Asie-Océanie occupe environ 36% du trafic contre 28-30% pour l’Europe, mais le trafic interafricain a connu aussi une croissance avec pratiquement 27%.

Quels produits sont échangés en Afrique ?

Nous importons beaucoup de brut du Nigeria principalement, mais pas que. Nous avons aussi des échanges avec le Maroc et plus généralement l’Afrique du Nord, pour ce qui est du phosphate, les engrais. Et nous sommes l’un des rares pays, avec le Cameroun, à faire de l’export. Nous avons aussi l’hévéa, le cacao, le café. Et puis la Côte d’Ivoire a commencé à s’intéresser à l’exploitation minière : le manganèse, le nickel, etc. Ça donne une perspective intéressante qui encourage les investissements.

Le port d’Abidjan est endetté, mais c’est une très bonne dette, un catalyseur pour l’économie. C’est une dette qui est soutenable parce que nos ressources font que nous ne serons pas en défaut de paiement. C’est important pour l’avenir de notre pays, mais aussi pour l’économie ouest-africaine parce que beaucoup de pays dépendent de la performance du port d’Abidjan. Notre rôle est d’offrir un service à la hauteur des attentes des opérateurs, que le port soit pour eux un catalyseur de leur approvisionnement et des exportations plutôt qu’un goulot.

C’est aussi un port qui doit se moderniser. Où en sont vos projets ?

Effectivement, si nous partons de 2011, nous avons fait un grand bond en avant. Nous avons hérité du résultat de plusieurs décennies de non-investissement. Depuis les années 1980, les gros investissements au niveau même de l’État de Côte d’Ivoire ont été arrêtés ou suspendus à cause des longues crises socio-politiques ou militaires que nous avons connues. Il fallait que le port d’Abidjan se mettent en ordre de marche. Des investissements importants ont donc été réalisés : environ 1 100 milliards de francs CFA de 2012 à 2022 via deux plans stratégiques. Certains projets sont terminés : le port de pêche en 2015, le canal de Vridi inauguré en 2019, le terminal RORO en 2020. Et il y a les chantiers en cours : le terminal céréalier et surtout le deuxième terminal à conteneurs. Aujourd’hui, Abidjan a le handicap de ne pas pouvoir recevoir les grands navires porte-conteneurs. Nous en recevons avec une capacité maximale de 3 500 conteneurs alors que les navires qui fréquentent les côtes ouest-africaines peuvent transporter jusqu’à 12 000 conteneurs.

Et donc, où en est ce chantier ?

Il est plutôt bien avancé. L’inauguration est prévue pour novembre 2022. Cela suscite beaucoup d’attente chez tous les acteurs portuaires et l’État de Côte d’Ivoire. C’était notre ambition et ça peut présager pour les 50 ans à venir la capacité de la Côte d’Ivoire et du port d’Abidjan à traiter les intrants. C’est un port qui est construit via un partenariat public-privé pour un investissement de 506 milliards de francs CFA : 250 par l’État via le port et 256 par l’opérateur privé. C’est un port qui sera issu des dernières technologies, pour les portiques par exemple. Et on a insisté sur l’aspect écologique sur le terminal avec des engins électriques. Le port d’Abidjan est certifié ISO 14001 (critères environnementaux).

Que pensez-vous du rachat des activités logistiques de Bolloré par MSC, dont celles du port d’Abidjan ?

Il faut traiter le sujet en deux niveaux, sur le plan systémique et sur le plan portuaire. Sur le plan purement portuaire, nous avons un contrat avec le groupe APMT-Bolloré qui a des exigences et qui en soit ne sont pas remises en cause. Par contre, sur le plan systémique, c’est autre chose. Les fusions de grands groupes comme ceux-là, il faut s’assurer qu’elles ne vont pas contre nos intérêts nationaux. Je pense que nous y travaillons tous pour faire en sorte que, quel que soit le changement à la tête de nos structures, l’intérêt de nos pays et de nos structures soient préservés.

Rédaction
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