(BFI) – La dette des pays africains est un problème croissant sur tout le continent. En Afrique subsaharienne, elle a atteint 56% du PIB en 2022, son niveau le plus élevé depuis le début des années 2000. La Zambie, le Ghana et le Mali ont tous fait défaut depuis le début de la pandémie. L’ONU décrit une situation « grave » dans 24 pays. Alors comment les pays africains mis en difficulté par ces dettes peuvent-ils réagir et réduire ce fardeau ainsi que les risques qui découlent de cette dette croissante ? C’est l’une des questions abordées à Marrakech lors de la première édition de la conférence Bloomberg New Economy en juin dernier.
Le niveau d’endettement des pays africains connaît une très nette hausse depuis 2015. Et, la conjoncture économique mondiale de ces deux dernières années noircit d’autant plus le tableau. Pour la ministre marocaine de l’Économie et des Finances, Nadia Fettah Alaoui, cette crise de la dette est due à des chocs exogènes, venus d’en dehors de l’Afrique : « Cette augmentation du coût et du poids de la dette est d’abord dû au durcissement des conditions financières venant de l’ouest des États-Unis. Cela est dû à la hausse du dollar qui frappe de plein fouet les devises en Afrique. En tant que décideurs politiques, nous avons la responsabilité d’avoir les politiques appropriées pour gérer cette crise, ce fardeau de la dette et créer des conditions propices à la croissance. Mais, je pense que la communauté internationale a sa part de responsabilité et le devoir d’assumer. »
Pour Anne-Laure Kiechel, fondatrice et PDG de Global Sovereign Advisory, le niveau de la dette est trop élevé « Qu’est-ce que l’on fait par rapport à cela ? Est-ce qu’on se lance dans une initiative d’annulation de dette ? Ça poserait beaucoup de problèmes. C’est théoriquement envisageable, mais en pratique ça l’est beaucoup moins. Ensuite, la seconde thématique autour de la dette, c’est la question de sa cherté. Soit parce que les taux augmentent, soit parce que la prime de risque augmente aussi. Et c’est quelque chose qui n’est évidemment pas bon pour les pays, car ils voient leurs revenus rester plats ou un tout petit peu monter alors que le coût de la dette augmente très fortement, et ça leur laisse des marges fiscales extrêmement faibles pour leurs dépenses d’éducation et de santé. Ça n’est absolument pas soutenable. »
Au-delà de l’architecture mondiale à repenser et aux nouveaux modèles de financements à envisager, Anne-Laure Kiechel estime que les États doivent être proactifs. « Plusieurs pays sont en train de restructurer leur dette. Ce sont des processus assez longs. C’est le cas de la Zambie qui est un cas emblématique. Le Ghana est plus rapide. Mais certains pays hésitent à être pro-actifs, car ils voient que ce sont des sujets extrêmement longs. »
Dans un environnement où les créanciers ont beaucoup évolués avec l’apparition de nouveaux acteurs comme la Chine, la Turquie ou encore l’Inde, le tout sera de trouver des solutions suffisamment rapides pour que les pays emprunteurs n’en pâtissent pas.