AccueilManagersDécideursLe Cameroun, un cas d'école de l'endettement opaque qui inquiète le FMI

Le Cameroun, un cas d’école de l’endettement opaque qui inquiète le FMI

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Contrairement à d’autres pays africains qui émettent des Eurobonds sur les marchés publics, le Cameroun a choisi un placement privé, négocié directement avec un cercle restreint d’investisseurs pré-identifiés par Citigroup Global Markets Ltd et Cygnum Capital Middle East. Selon les autorités locales, cette méthode avait pour but « la garantie et le contrôle dans le but d’atteindre efficacement et dans les brefs délais l’objectif de la levée des fonds ». Mais cette efficacité a un prix qui sait traduit par un taux d’intérêt de 10,75%, bien plus élevé que ceux des prêts concessionnels.

Cette stratégie camerounaise est précisément le type de montage qui alerte les institutions de Brettons Woods. Dans une note publiée plutôt cette année, relayé mardi 14 octobre 2024 par Reuters, le FMI a pointé du doigt la croissance rapide des prêts privés aux pays à faible revenu. Hors obligations internationales, il représentait 10% de leur dette publique fin 2023 contre seulement 6% fin 2010. Le problème, selon les experts, est que ces montages « créatifs » rendent l’endettement publics moins transparent. Anna Gelpern, professeure de Droit à l’université de Georgetown et spécialiste des questions de dette, l’affirme sans détour. « Tout le monde aime la transparence … (mais) on constate une forte diminution de la documentation sur les prêts bancaires commerciaux et autres financements privés. Cela signifie que tout devient obscur en matière de transparence de la dette », a-t-elle confié à nos confrères de Reuters.

Le Cameroun ne sait pas arrêté-là. Le pays a bouclé plutôt cette année une opération avec la Banque africaine d’import-export (Afreximbank) pour un prêt de 200 milliards de Fcfa via un « swap en monnaie locale ». Ce mécanisme complexe permet à Afreximbank d’injecter des devises qui sont converti en Francs Cfa via la Beac pour souscrire à la dette camerounaise en monnaie locale. Si cette opération protège le Cameroun du risque de change, elle ajoute une couche supplémentaire de complexité à son profil d’endettement.

Pour les investisseurs et les institutions internationales, cette opacité complique l’évaluation de la santé financière réelle du pays. Thys Louw, gérante du portefeuille chez Ninety One, résume l’inquiétude générale. « Cela accroit les risques. Tout ce qui est, un tant soit peu opaque, ajoute de la complexité », a-t-il déclaré. Cette complexité pourrait à l’avenir, se retourner contre le Cameroun. Elina Theodora Kopoulou, directrice générale chez Manulife Investment Management, prévient que « s’il n’y a pas de transparence, cela se traduira par le rendement que vous devrez offrir pour accéder au marché » lit-on dans les colonnes de Reuters. En d’autres termes, moins un pays est transparent, plus ses futurs emprunts lui coûteront cher.

Le cas du Cameroun n’est pas isolé. Des pays comme l’Angola, avec son « total return swap » d’un milliard de dollar avec JP Morgan, ou la Colombie et le Panama qui ont également évité les marchés publics, empruntent des voies similaires. Comme le souligne Reza Baqir, responsable du conseil souverain chez Alvarez et Marsal, « concernant des emprunts endossés à des garanties, ces instruments cachés devraient inquiéter des institutions comme le FMI, car ils compliquent vraiment la notion de créancier privilégié ».

Rédaction
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