(BFI) – Dans une note publiée le 24 octobre 2025, le Groupe d’action financière (Gafi) a confirmé le maintien du Cameroun dans sa liste grise. Cette liste regroupe les juridictions « sous surveillance accrue », engagée à combler des lacunes stratégiques dans la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme (LBC/FT). L’organisme intergouvernemental y détaille les progrès des pays concernés, donc le Cameroun, et fixe de nouvelles attentes.
Le Gafi rappelle que l’inscription d’un pays sur cette liste ne signifie pas qu’il est soumis à des contre-mesures, mais qu’il fait l’objet d’un suivi renforcé. Les Etats concernés doivent démontrer, dans des délais convenus, la mise en œuvre effective des engagements pris. Depuis janvier 2023, le Cameroun s’est engagé à travailler étroitement avec le Gafi et le groupe d’action contre le blanchiment d’argent en Afrique centrale (Gabac) pour corriger les insuffisances de son dispositif national.
Selon la note du Gafi, le Cameroun doit poursuivre la mise en œuvre de son plan d’action, qui comprend plusieurs volets notamment l’alignement des politiques nationales sur l’évaluation des risques, supervision accrue des institutions financières, le renforcement de la transparence sur les bénéfices effectifs des entreprises, l’amélioration de l’échange d’information entre la cellule nationale de renseignement financier et les autres autorités, et l’intensification des enquêtes sur les infractions de blanchiment et de financement de terrorisme.
Plus d’un an après cet engagement, le Cameroun affiche cependant un bilan mitigé. D’après le dernier rapport de suivi, seuls 8 des 24 points d’actions convenus ont été largement remplis, soit un taux d’exécution inférieur à 40%. Cette lenteur a même compromis la sortie de la liste grise, initialement envisagé en septembre 2025.
Un rappel à l’ordre du Ministre des Finances
Face à cette situation, le ministre camerounais des finances, Louis Paul Motaze, a levé le ton. Le 25 juin 2025, à l’ouverture de la première session ordinaire du comité de coordination des politiques nationales de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme, il a dénoncé des retards jugés « inacceptables » dans la mise en œuvre du plan convenu avec le Gafi.
« Où est le problème ? Pourquoi tant de lenteurs alors que nous avons défini ce plan nous-même ?, a-t-il lancé, selon le compte rendu officiel de la réunion. Le ministre a accusé certaines administrations de « négligence » et de « réticence » avant de prévenir qu’« aucune excuse ne sera désormais acceptée ». L’avertissement intervient dans un contexte de vigilance internationale accrue. Le maintien du Cameroun sur la liste grise expose son économie à des risques de désengagement bancaire international, selon plusieurs experts régionaux. L’ancien secrétaire permanent du Gabac, Désiré Geoffroy Mbock, rappelait récemment que cette situation fragilise la confiance des institutions financières étrangères et compliquent les transactions transfrontalières. Une dégradation cers la « liste noire » du Gafi, qui concerne les juridictions jugées à haut risques, serait synonyme d’isolement financier et de restriction accrues sur les opérations avec les banques étrangères.
Le gouvernement affirme avoir pris plusieurs mesures après l’inscription du pays sur la liste grise, notamment la création par décret présidentiel, en octobre 2023, du comité national de coordination LBC/FT. Ce comité a pour mission de suivre la mise en œuvre du plan d’action et de coordonner les différents acteurs institutionnels. Le Premier ministre a également tenu plusieurs audiences avec les responsables du Gabac et les partenaires techniques impliqués.




