(BFI) – Depuis l’autorisation donnée par le président de la République le 21 décembre 2020, la tension est perceptible au Fonds de développement des filières cacao du Cameroun. Avec le « Guichet Producteurs », l’Etat du Cameroun prépare une révolution dans les subventions en finançant directement les producteurs.
Le Guichet Producteurs est le résultat du constat froid d’un échec cuisant. En quatorze ans, l’Etat du Cameroun a dépensé 39 milliards de Fcfa sans que les résultats ne soient en corrélation vertueuse avec l’état du verger, les volumes et la qualité des produits commercialisés ou le niveau de vie des producteurs.
Plusieurs semaines de négociations
Avec le Guichet Producteur, chaque producteur de cacao et café finance l’acquisition de ses intrants : des engrais aux produits phytosanitaires en passant par le petit équipement. Dans ce dispositif, le cacaoculteur ou caféiculteur bénéficie d’une subvention payée par le Fonds de développement des filières cacao et café (FODECC), de manière directe, auprès de son fournisseur d’intrants situé, comme cela est souhaité, à proximité de son installation. Pour y parvenir, Samuel Donatien Nengue, l’Administrateur du Fonds, s’apprête à contractualiser avec des agro-dealers, banquiers, établissements de microfinance, compagnies de téléphonie mobile, partenaires stratégiques opérationnels et bailleurs de fonds, après plusieurs semaines de négociations.
Des subventions de masse et à la carte
Deux types de subventions seront proposées dans le cadre du Guichet Producteurs. D’après l’Administrateur du FODECC, il s’agit des subventions de masse pour la première catégorie. Elles concernent tous les producteurs de cacao et de café sans discrimination, en référence à ceux qui exploitent une superficie allant de 200 mètres carrés à 10 hectares. La deuxième catégorie, quant à elle, concerne des subventions à la carte. Elles font appel à une autre forme d’organisation et à des contraintes plus importantes. Par ce double mécanisme, l’Etat du Cameroun va directement apporter des appuis aux producteurs pour améliorer leurs rendements ainsi que leur qualité de vie.
Atteindre 50 milliards de Fcfa en cinq ans
Pour la première année (2021) les enveloppements budgétaires s’élèvent à 6.2 milliards de FCFA. Mais Samuel Donatien Nengue rassure : « Elles sont appelées à croitre de manière exponentielle pour atteindre 50 milliards dans cinq ans, après la période de rodage ». Etendue à huit des dix régions que compte le Cameroun, cette activité concerne environ 600.000 (six cent mille) producteurs pour plus d’un million d’hectares de verger. Il est entendu que ces chiffres seront mis à jour au fur et à mesure que l’auto-identification des producteurs avancera sur le terrain, rassure-t-on au 3ème étage du FODECC où s’affaire l’état-major de l’établissement en vue du lancement officiel le 5 mai 2021.
Impossible de contracter un emprunt
Au terme de l’article 22 du décret organique du Fonds, les ressources proviennent de la redevance à l’exportation du cacao et du café, des produits issus des amendes résultant de l’exportation des produits de mauvaise qualité, des contributions diverses, ainsi que des dons et legs de toute nature. Une fois collectées par le Fonds ou des intermédiaires, ces ressources sont versées totalement et directement au compte du FODECC ouvert auprès de la Banque des Etats d’Afrique centrale (BEAC). L’établissement effectue ensuite ses paiements à partir des comptes ouverts par l’Administrateur auprès des banques agréées. Le Fonds de subventions ne peut contracter d’emprunt.
Par Guy Gweth est président du Centre africain de veille et d’intelligence économique (CAVIE) et directeur du programme Doing Business in Africa à Centrale Supelec.