(BFI) – Deux nouveaux rapports de la Banque mondiale mettent en lumière les défis économiques du Cameroun et proposent des pistes de réformes pour libérer le potentiel du pays, notamment dans le secteur forestier.
La Banque mondiale vient de publier deux rapports sur l’économie camerounaise : la « Mise à jour économique du Cameroun 2024 » et la « Revue des finances publiques du Cameroun. » Ces analyses dressent un tableau nuancé de la situation économique du pays et proposent des pistes de réformes pour stimuler la croissance et améliorer la gestion des finances publiques.
Selon ces rapports, l’économie camerounaise a connu un ralentissement en 2023, avec une croissance du PIB de 3,3 % contre 3,6 % en 2022. Cette décélération a touché tous les secteurs économiques, principalement en raison d’investissements publics inférieurs aux prévisions, de la hausse des prix et des conflits internes persistants.
L’inflation a quant à elle atteint 7,4 % en 2023, contre 6,3 % l’année précédente, sous l’effet de l’augmentation des prix alimentaires et des coûts de transport. Malgré ces difficultés, les perspectives à moyen terme restent encourageantes. La Banque mondiale prévoit une croissance du PIB de 4 % en 2024, qui devrait s’accélérer pour atteindre une moyenne de 4,5% sur la période 2025-2027.
Amélioration du secteur énergie
Cette reprise serait portée par une amélioration de l’approvisionnement énergétique et une hausse des investissements publics. Cheick F. Kanté, directeur pays de la Banque mondiale pour le Cameroun, a ainsi souligné l’importance du secteur forestier dans cette dynamique.
« Promouvoir une meilleure gouvernance dans le secteur forestier en encourageant la certification forestière, les politiques fiscales intelligentes face au climat, l’augmentation de la valeur ajoutée dans l’industrie du bois et l’engagement des communautés locales garantira des recettes publiques élevées, aidera à préserver les forêts et jettera les bases pour attirer davantage de financements climatiques », a-t-il dit.
Les rapports de la Banque mondiale mettent en lumière plusieurs défis structurels majeurs auxquels le Cameroun est confronté. Sur le plan fiscal, le pays souffre d’un système caractérisé par une assiette étroite et une application inadéquate des règles, ce qui favorise la fraude et l’évasion fiscales à grande échelle.
Une assiette fiscale étroite
Cette problématique est exacerbée par une gestion budgétaire opaque, marquée par un recours fréquent à des procédures exceptionnelles qui compromettent la transparence et l’efficacité des dépenses publiques, souligne la BM.
Par ailleurs, les analyses pointent du doigt l’insuffisance des investissements dans des secteurs cruciaux pour le développement du pays. Les dépenses allouées à l’éducation, à la santé et à l’aide sociale demeurent nettement en deçà des normes internationales, limitant ainsi le potentiel de croissance et de développement humain. Cette situation est aggravée, selon la Banque mondiale, par une décentralisation fiscale limitée, qui freine l’amélioration des services publics au niveau local. En effet, malgré les cadres législatifs existants, le transfert effectif des compétences et des ressources vers les communes et les régions reste insuffisant, entravant la capacité des autorités locales à répondre efficacement aux besoins de leurs populations, relève l’institution financière.
« Malgré son potentiel, le Cameroun n’a jamais enregistré de résultats économiques satisfaisants, ce qui se traduit par une lente progression du revenu par habitant et une réduction de la pauvreté. Aujourd’hui plus que jamais, un programme de réformes budgétaires audacieux est impératif pour libérer tout le potentiel du pays et lui assurer un avenir prospère », note Robert Utz, économiste principal du pays à la Banque mondiale et l’un des auteurs du rapport.
Les recommandations clés des rapports incluent la mise en place d’une stratégie de recettes à moyen terme, une réforme globale des pratiques de gestion budgétaire, et une accélération de la décentralisation fiscale. Ces mesures visent à améliorer la collecte des impôts, à optimiser les dépenses publiques et à renforcer l’efficacité et l’équité des services publics.