(BFI) – L’annonce des discussions de fusion entre SGS et Bureau Veritas, deux leaders mondiaux du Testing, Inspection & Certification (TIC), a provoqué une onde de choc dans le secteur et suscité un questionnement stratégique, notamment sur le marché continental.
Bien que l’Afrique ne soit pas leur niche prioritaire, une telle fusion aurait créé une domination en forme de quasi-monopole sur des segments tels que la certification, les services aux gouvernements, les inspections industrielles (Oil & gas, mines), les infrastructures ou les services pour l’environnement.
Un risque pour les acteurs locaux
SGS et Bureau Veritas sont des entreprises centenaires, solidement implantées en Afrique avec un chiffre d’affaires annuel cumulé de l’ordre de centaines de milliards de francs CFA. « Une telle fusion aurait fragilisé la croissance des bureaux locaux qui émergent depuis une à deux décennies, souvent fondés par d’anciens cadres dirigeants des grandes multinationales du TIC qui bénéficient d’une expertise et d’un solide réseau, mais souffrent clairement du complexe de la marque dont jouissent et profitent les multinationales » rapporte Aurelien Ludovic Kilama, Gestionnaire bâtiments et infrastructures chez My Bulding Tips.
Un modèle de croissance à repenser
Pour accélérer leur expansion et anticiper les mutations du marché, les géants du secteur des TIC procèdent par fusions et acquisitions, diversification de leur portefeuille, en naviguant dans des « océans bleus » en investissant dans des niches stratégiques et les nouvelles technologies, notamment l’intelligence artificielle. A l’opposé, les entreprises locales misent sur la croissance organique et des prix plus compétitifs.
Parfois à l’échelle locale, elles proposent une meilleure réactivité mais restent à la traîne en terme d’investissements dans la recherche ou la mise en œuvre d’outils technologiques performants.
« Cette problématique s’étend à l’ensemble des acteurs de la construction à savoir les cabinets d’architecture et les entreprises. Il devient critique pour ces acteurs locaux de favoriser des alliances stratégiques régionales voire mondiales afin de peser sur le marché local puis international et d’influencer les dynamiques concurrentielles » indique Ludovic Kilama.
Un tournant stratégique
Le marché mondial du TIC pèse environ 232 Milliards de dollars (2024) et est projeté à 280 Milliards de dollars en 2029. Les entités africaines comptent-elles seulement pour 1% ? Il est loin le temps de l’époque précoloniale lorsque Mansa Moussa, alors l’homme le plus riche du monde, commerçait à travers la planète.
Les États africains ont un rôle crucial à jouer en accompagnant cette transformation. Prendre exemple, avec la mesure nécessaire, sur le volontarisme des présidents Trump ou Xi Jinping. Il est essentiel de créer des champions, d’encourager la collaboration régionale qui commence par la libre circulation des personnes et des services et surtout d’impulser des partenariats avec les écosystèmes technologiques dynamiques et performants du Kenya, du Nigeria, de l’Égypte, du Rwanda ou de l’Afrique du Sud, pour déboucher sur une proposition de valeur unique. L’innovation et la synergie entre les acteurs du continent seront la clé pour rivaliser avec les mastodontes internationaux et trouver une place dans un monde en constante mutation.