(BFI) – Certains l’ont décrit comme un changement de donne au niveau mondial. La Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf), l’une des plus grandes zones internationales de libre-échange au monde, a commencé à opérer sous des régimes préférentiels le 1er janvier 2021.
Avec la récession induite par la COVID qui s’atténue au fur et à mesure que les taux de vaccination augmentent, il y avait beaucoup d’espoir pour que la ZLECAf montre qu’elle pouvait être à la hauteur de ses espérances. Alors, qu’est-ce qui a marché ?
Depuis le début des échanges le 1er janvier, certains échanges intra-africains ont eu lieu dans le cadre des accords de la ZLECAf, sur la base de preuves anecdotiques, notamment des boissons alcoolisées et des produits cosmétiques (les données récentes sur les flux commerciaux ne sont pas encore totalement disponibles).
Bien que le commerce agricole intra-africain reste inférieur à 20 %, contre plus de 60 % pour l’Europe et l’Asie, les échanges devraient augmenter une fois les négociations terminées et les barrières commerciales progressivement supprimées.
À ce jour, 42 des 55 pays africains ont ratifié l’accord, et 88 % des négociations sur les règles d’origine spécifiques aux produits ont été conclues, couvrant plus de 70 % du commerce intra-africain selon le secrétariat de la ZLECAf en 2021.
Cependant, une lacune importante de l’accord est que de nombreux biens sensibles à la nutrition pourraient ne pas être entièrement libéralisés ou progressivement libéralisés sur de plus longues périodes, comme l’indiquent les négociations en cours sur les offres tarifaires. Parmi les biens protégés figurent les animaux vivants, la viande, le poisson, le lait et les produits laitiers, les fruits et légumes, le café, le thé, les épices, les oléagineux et les sucres.
Les produits agricoles et les matières premières de l’Afrique ont traditionnellement dominé le commerce avec le reste du monde (cacao, café, coton, tabac et épices) avec un mélange de produits transformés (sucre de canne et de betterave, thon préparé ou conservé, vin et autres préparations alimentaires).
Pour que la ZLECAf atteigne son plein potentiel en exploitant toute la gamme de la chaîne de valeur agroalimentaire, y compris l’agro-transformation, les gouvernements et les partenaires de développement doivent intensifier leurs efforts pour développer le commerce intra-africain en apportant un soutien au secteur privé en matière de politique et de renforcement des capacités, d’élaboration de programmes, de gestion des connaissances et de collecte et d’analyse des données.
L’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) fournit justement un tel soutien aux gouvernements, au secteur privé et aux petits exploitants agricoles afin qu’ils tirent pleinement parti de ce que l’accord et le commerce panafricain ont à offrir.
À l’appui de la mise en œuvre de la ZLECAf, la FAO, en collaboration avec la Commission de l’Union africaine, a lancé en avril 2021 le Cadre pour stimuler le commerce intra-africain des produits et services agricoles afin de guider les décideurs, le secteur privé et la société civile dans le développement et l’expansion d’un commerce intra-africain durable, inclusif et résilient. Ce cadre et d’autres produits de connaissance produits par l’Organisation servent également d’outils de plaidoyer, de dialogue, d’analyse et de mise en œuvre des politiques.
À l’avenir, l’amélioration des systèmes de contrôle des aliments est un élément crucial de la croissance et du maintien de l’expansion du commerce agricole intra-africain. À cet égard, la FAO fournit le soutien nécessaire pour renforcer la capacité des pays à se conformer aux normes de sécurité alimentaire et à faciliter le commerce.
L’Organisation promeut également des chaînes de valeur agro-industrielles inclusives afin de développer le commerce intra-africain et d’améliorer la sécurité alimentaire et les moyens de subsistance, notamment parmi les groupes vulnérables tels que les femmes et les jeunes. Enfin, un élément essentiel au succès de la ZLECAf est l’accès facile aux données. Les données relatives au marché et au commerce doivent être démocratisées et numérisées pour permettre aux micro, petites et moyennes entreprises de se développer et de maximiser leur potentiel commercial.
La FAO s’efforce de construire et d’intégrer des systèmes d’information sur le commerce et les marchés à tous les niveaux de la chaîne de valeur agricole afin de garantir des systèmes agroalimentaires inclusifs.
Il reste encore du travail à faire, mais après un an d’existence dans des circonstances moins qu’idéales en raison du COVID-19, la ZLECAf a montré des signes positifs qui permettent d’espérer un avenir où le commerce africain s’élèvera à la hauteur du changement de jeu mondial qu’il est promis d’être.
Il est plus important que jamais que les pays s’unissent aux partenaires de développement pour consolider les gains réalisés en 2021 en renforçant les capacités productives, en soutenant les investissements dans les infrastructures essentielles des marchés des intrants et des extrants, en mettant en place des contrôles alimentaires harmonisés, des systèmes d’information sur le commerce et les marchés, et en garantissant des marchés inclusifs qui peuvent sortir les plus vulnérables de la pauvreté.
Ameir Mbonde est spécialiste des politiques commerciales du Bureau régional de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) pour l’Afrique.
Félix Victor Dévaloix