(BFI) – Alors que des perspectives prometteuses sont annoncées pour l’aviation civile africaine, plusieurs défis subsistent, notamment ceux liés à l’approvisionnement en carburants d’aviation, dont les coûts représentant entre 30 et 40 % des charges d’exploitation, influencent la détermination des prix des billets ainsi que le niveau de revenu des transporteurs. Des défis que la nouvelle raffinerie de Dangote pourrait aider à résoudre en partie.
Le démarrage prochain de la production de Jet A1 dans la raffinerie de Dangote s’annonce comme une véritable avancée pour l’aviation civile nigériane, particulièrement pour les compagnies locales. Malgré ses grandes réserves pétrolières, le Nigeria, comme la plupart des pays pétroliers d’Afrique, ne dispose pas d’une capacité de raffinage et de stockage adéquate. En conséquence, le pays est obligé de faire ses approvisionnements en carburant Jet A1 en grande partie chez des fournisseurs internationaux (TotalEnergies, Shell, ExxonMobil…). La localisation de leurs unités de production situées majoritairement hors du continent engendre de nombreux défis logistiques. Entre risque de pénurie et volatilité du marché du pétrole provenant des variations de la production ou la fluctuation du dollar, beaucoup de facteurs difficiles à maîtriser augmentent les contraintes du secteur.
Des opportunités pour l’aviation civile nigériane
À pleine capacité, la nouvelle raffinerie devrait produire 4 millions de tonnes de carburant d’aviation par an. De quoi répondre aux besoins de l’industrie et disposer d’excédent pour l’exportation, selon le groupe Dangote. La couverture de la demande nationale est ainsi présentée comme une solution aux pénuries qui, lorsqu’elles surviennent, paralysent les activités des compagnies et réduisent la fréquentation des aéroports, comme cela a été le cas dans plusieurs pays durant la crise sanitaire de la Covid et au début du conflit russo-ukrainien.
Des impacts significatifs sur les coûts d’exploitation sont aussi attendus, ce qui, selon le ministre de l’Aviation, Festus Keyamo, pourrait entraîner une réduction des prix des billets d’avion. Selon United Nigeria Airlines, les marges bénéficiaires des compagnies, et donc les possibilités de croissance (d’agrandissement de la flotte ou du réseau) sont en grande partie tributaires du coût du carburant qui peut représenter jusqu’à 40 % des charges d’exploitation.
En outre, la raffinerie devrait réduire les pertes subies par l’économie nationale, du fait de la facture élevée des importations de ce produit. En effet, un rapport de Phillips Consulting révèle que l’industrie de l’aviation au Nigeria a dépensé 192 milliards de dollars en carburant en 2022.
Avantages et perspectives pour l’Afrique de l’Ouest et le reste du continent
Au-delà du Nigeria, le groupe Dangote a indiqué qu’une partie de la production devrait être exportée vers l’Afrique de l’Ouest et le reste du continent, ce qui pourrait aider à réduire les défis liés à la pénurie, la rentabilité de l’activité et même la cherté des billets pour d’autres compagnies aériennes du continent.
Toutefois, les prévisions de croissance pour le marché de l’aviation civile en Afrique qui annoncent une hausse du trafic d’environ 5,7 % par an en moyenne jusqu’en 2034 illustrent la nécessité d’investissements similaires dans le secteur. En effet, selon l’IATA, les flux actuels de passagers devraient doubler d’ici 2040, ce qui engendrera d’après le constructeur aéronautique américain Boeing un besoin de 1180 nouveaux avions (295 gros-porteurs et 885 monocouloirs) d’ici 2042 pour soutenir cette croissance.
Cependant, ces investissements ne pourraient résoudre les défis structurels du secteur dont l’essor est encore mis à rude épreuve par des facteurs comme la faible qualité des infrastructures et des services, la flotte très limitée de plusieurs compagnies, les taxes aéroportuaires élevées ainsi que la structure actuelle de l’offre, un marché fragmenté caractérisé par un modèle où chaque pays veut son transporteur national par Etat, etc. A cela s’ajoute le challenge de la transition vers un carburant d’aviation durable (SAF), alors que l’industrie aérienne vise l’objectif « zéro émission carbone » à l’horizon 2050, conformément aux prévisions de l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI).