(BFI) – Christian Yoka, ancien directeur Afrique de l’Agence française de développement (AFD), a été nommé ministre des Finances, du Budget et du Portefeuille public du Congo, à la suite d’un remaniement ministériel inattendu. Cette décision, prise par le président Denis Sassou Nguesso dans la nuit du 10 au 11 janvier 2025, intervient dans un contexte économique marqué par des tensions budgétaires et une dette publique préoccupante.
Christian Yoka a été nommé à ce poste en remplacement de Jean-Baptiste Ondaye qui, depuis novembre dernier, était en désaccord ouvert avec le Premier ministre et certains cercles du palais, notamment sur la directive du chef de l’État concernant l’unicité des caisses et la centralisation des dépenses au niveau du Trésor.
Juriste chevronné dans les domaines de la finance internationale et du développement, Christian Yoka est titulaire d’un DESS en droit et fiscalité de l’Université Paris Panthéon-Sorbonne ainsi que d’un master en droit bancaire et financier de l’Université de Boston. Il arrive sur un terrain glissant où, depuis Gilbert Ondogo, la durée du mandat d’un ministre des finances dépasse rarement les deux ans.
En effet, avant d’être nommé comme ministre des Finances au Congo, Christian Yoka avait occupé le poste de directeur du département Afrique de l’Agence Française de Développement (AFD) en 2021. Il a une longue expérience au sein de l’AFD, ayant dirigé des équipes dans diverses régions stratégiques d’Afrique. De 2018 à 2021, il a été directeur régional pour l’Afrique de l’Est. Auparavant, il a occupé les mêmes fonctions pour le Cameroun, la République centrafricaine et la Guinée équatoriale (2016-2018), puis pour l’Éthiopie, le Soudan, le Soudan du Sud, l’Érythrée et la Somalie (2013-2016). Il a entre autres également dirigé l’agence de l’AFD en RDC de 2009 à 2013, acquérant une riche expérience des relations internationales et des stratégies de financement du développement.
Le choix porté sur ce technocrate chevronné pour piloter l’économie nationale face à des défis majeurs est un signal lancé à l’endroit des milieux financiers. L’expertise de Christian Yoka en financement du développement et gestion de projets en Afrique est un atout crucial pour la République du Congo.
Des défis structurels persistants
Christian Yoka hérite d’un secteur bancaire fragile, marqué par un taux élevé de prêts non performants (15,2% en 2023) et un accès limité au crédit, représentant 6,6% du PIB non pétrolier. La faible inclusion financière, exacerbée par l’absence d’un réseau bancaire étendu en milieu rural, et la lenteur des réformes de lutte contre le blanchiment d’argent compliquent davantage la tâche. Pour répondre à ces défis, il devra renforcer la supervision bancaire, promouvoir la digitalisation via la banque mobile, et orienter le financement vers les secteurs non pétroliers. L’enjeu : revitaliser un système clé pour diversifier l’économie.
Le secteur pétrolier, qui constitue la colonne vertébrale de l’économie congolaise, doit se faire accompagner par une diversification, notamment dans l’agriculture, les services et les industries extractives, a insisté le FMI. Les indicateurs sociaux demeurent préoccupants, avec une pauvreté persistante et des inégalités croissantes, malgré une reprise économique modérée.
Les agences de notation disent continuer de surveiller de près la trajectoire économique du pays. Moody’s maintient une notation « Caa2 », et signale un risque élevé de défaut. S&P, de son côté, note que le Congo reste dépendant des conditions économiques mondiales pour honorer ses engagements financiers.
André Noir