(BFI) – Alors que le retour de Donald Trump à la Maison Blanche augmente les incertitudes sur sa prorogation, le régime de préférences commerciales accordé depuis mai 2000 par les Etats-Unis aux pays d’Afrique subsaharienne a continué à profiter à un nombre limité de pays et de secteurs dans la région.
Les exportations des pays d’Afrique subsaharienne vers les Etats-Unis sous le régime de préférences commerciales African Growth and Opportunity Act (AGOA) ont atteint 8 milliards de dollars en 2024, enregistrant ainsi une baisse de 13% par rapport à 2023, selon un rapport publié le vendredi 28 février, par le Congressional Research Service (CRS), l’Institut de recherche sur les politiques publiques du Congrès américain.
Le rapport indique cependant que le programme lancé en mai 2000 bénéficie essentiellement à une poignée de pays et un nombre très limité de secteurs d’activité économique dans la région. Cinq pays ont concentré près de 65% des exportations africaines vers la première puissance économique mondiale durant l’année écoulée : l’Afrique du Sud (3,76 milliards de dollars), le Kenya (567 millions de dollars), Madagascar (345 millions), la RD Congo (287 millions) et la Côte d’Ivoire (178 millions).
Les exportations de pétrole brut se sont élevées à 2 milliards de dollars en 2024, représentant ainsi 25 % du total des exportations des pays éligibles au programme AGOA vers les Etats-Unis. Le Nigeria est resté le premier fournisseur de pétrole brut aux Américains en 2024 (1,6 milliard de dollars).
Les exportations des produits non pétroliers se sont établies à 6 milliards de dollars. Les principales catégories des exportations non énergétiques sont les véhicules et les composants automobiles (2,4 milliards de dollars), le textile-habillement (1,2 milliard de dollars), les produits agricoles et alimentaires (949 millions de dollars), les métaux de base (711 millions de dollars) et les produits chimiques (251 millions de dollars).
L’AGOA permet aux pays d’Afrique subsaharienne éligibles d’exporter près de 1800 produits vers les Etats-Unis sans payer des droits de douane. Ces produits s’ajoutent à 5000 autres pouvant bénéficier d’un accès au marché américain en franchise de droits de douane dans le cadre du système des préférences généralisées (SPG).
Incertitudes
Chaque année, Washington actualise la liste des pays éligibles à l’AGOA en fonction notamment de leur attachement à l’économie du marché, au respect de l’Etat de droit et aux politiques de lutte contre la pauvreté. Le dispositif prend aussi en considération les avancées ou les reculs démocratiques des pays concernés.
Durant le mandat de l’ex-président américain, Joe Biden, un groupe bipartisan de sénateurs américains a présenté à la Chambre haute du Congrès un projet de loi portant sur la prorogation de l’AGOA jusqu’en 2041.
Bien que le nouveau locataire de la Maison Blanche ne soit pas un chantre de la libéralisation du commerce, les experts jugent l’abandon du programme peu probable. « L’accord commercial conclu avec l’Afrique subsaharienne a toujours fait l’objet d’un soutien bipartisan au Congrès américain. En avril 2024, un groupe bipartisan de sénateurs américains a d’ailleurs présenté à la chambre haute du Congrès un projet de loi portant sur la prorogation de l’AGOA jusqu’en 2041 », souligne Richard Morrow, analyste au sein du think tank Brenthurst Foundation, dans une tribune publiée en décembre sur le site Web du groupe de réflexion indépendant américain Council on Foreign Relations.
Intitulée « AGOA at a Crossroads », l’analyse rappelle également que ce programme a déjà survécu à la première administration Trump en dépit d’une rhétorique commerciale protectionniste similaire à celle qui prévaut actuellement à Washington.
Aux Etats-Unis, les défenseurs du programme AGOA considèrent qu’il encourage l’investissement et la croissance économique en Afrique subsaharienne, ce qui générerait potentiellement une demande pour les biens et services américains à mesure que les économies de la région se développent, tout en contribuant à contrer l’influence de la Chine dans la région.
Les pourfendeurs du régime de préférences commerciales mettent cependant en avant la concurrence accrue à laquelle plusieurs producteurs américains sont confrontés, surtout en l’absence de réciprocité en matière d’accès aux marchés.