AccueilFinanceConjonctureAu Cameroun, le retrait d’Ernst & Young rebat les cartes

Au Cameroun, le retrait d’Ernst & Young rebat les cartes

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Le paysage du conseil et de l’audit en Afrique centrale s’apprête à connaître un tournant historique. L’annonce du départ progressif d’Ernst & Young d’ici 2026, après celui de PwC, marque la fin d’une époque pour les grands groupes internationaux dans la région. Dans un marché évalué entre 300 et 600 milliards de Fcfa par an, cette décision laisse un vide stratégique que les cabinets africains, et particulièrement gabonais, pourraient bien s’empresser de combler.

Derrière ce retrait, EY évoque un repositionnement global et une volonté de se recentrer sur les marchés à fort rendement. Mais sur le continent, la lecture est différente : les contraintes locales, la complexité administrative et l’exigence d’une adaptation aux contextes juridiques nationaux ont ébranlé les certitudes des géants du conseil. En quittant le Cameroun, le Gabon ou encore le Congo, EY acterait l’échec d’un modèle standardisé, inadapté à certains écosystèmes économiques africains.

Cette recomposition du marché de l’audit fait émerger une double opportunité : d’un côté, l’accélération de la structuration des cabinets locaux ; de l’autre, la relocalisation de l’expertise, avec des acteurs plus agiles, mieux ancrés et plus réactifs aux besoins des administrations, des PME et des grandes entreprises locales.

Au Gabon, ce basculement peut constituer un levier stratégique pour la souveraineté économique. En renforçant leurs capacités techniques, leurs standards de conformité et leurs outils d’analyse, les cabinets nationaux ont l’occasion de se positionner comme des partenaires de référence. Plusieurs d’entre eux, comme ACE Partners ou EXCO, ont déjà engagé cette montée en gamme, en capitalisant sur leur connaissance fine du droit OHADA, du système fiscal gabonais et des réalités de gouvernance publique.

En outre, cette dynamique pourrait favoriser l’émergence d’une nouvelle génération de talents dans le secteur du chiffre et du conseil stratégique. Des ingénieurs financiers aux fiscalistes en passant par les analystes sectoriels, un vaste champ s’ouvre pour les jeunes diplômés et les professionnels expérimentés désireux de contribuer à un écosystème de services à haute valeur ajoutée.

Encore faut-il que l’État accompagne cette transition. En exigeant davantage de transparence dans les appels d’offres, en soutenant la montée en compétence des cabinets nationaux via des programmes ciblés, ou encore en favorisant l’accès aux marchés publics, les autorités peuvent jouer un rôle structurant dans cette nouvelle phase. À défaut, le vide laissé par EY pourrait être récupéré par d’autres cabinets étrangers, sans changement réel de paradigme.

Ce désengagement des Big Four pourrait, in fine, servir de déclencheur. Pourvu que les acteurs locaux sachent transformer cette contrainte en avantage compétitif durable.

Antoine Mboussi

Rédaction
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