(BFI) – La direction générale des Impôts (DGI) du ministère des Finances (Minfi) annonce annonce dans une note officielle consultée par Investir au Cameroun, que la taxe sur les transferts d’argent (TTA) par voie électronique, instituée par la loi de finances 2022, a généré des recettes de 7,3 milliards de FCFA entre février et mai 2022. Ce résultat augure d’un dépassement des objectifs de recettes au titre de cette taxe.
En effet, en considérant qu’aucun centime n’a été collecté au titre de cette taxe au cours du mois de janvier 2022, l’enveloppe collectée au cours des quatre mois susmentionnés révèle un rythme moyen de mobilisation de recettes d’un peu plus de 1,8 milliard de FCFA chaque mois. Projetée sur les sept mois restants de l’année 2022, la TTA devrait générer un peu plus de 12,77 milliards de FCFA de recettes supplémentaires. Dans cette perspective, le pays devrait donc collecter en tout 20,07 milliards de FCFA sur toute l’année. Ce qui dépasse déjà de 7 millions de FCFA l’objectif du gouvernement au cours de l’exercice budgétaire courant.
Mais comme le fait remarquer un tenancier d’un point Mobile Money, en considérant que les périodes de fêtes de fin d’année et de rentrées scolaire et universitaire (août, septembre et octobre) sont des périodes fastes de l’activité de transfert d’argent, il est loisible d’anticiper un dépassement plus important des prévisions initiales de la DGI, sur les recettes attendues de la TTA.
En effet, en plus des dépôts bancaires, de nombreux établissements scolaires et universitaires du Cameroun autorisent le paiement des frais de scolarité via les services de paiements mobiles des opérateurs de téléphonie. En fin d’année, le boom des achats pendant les fêtes de Noël et du Nouvel An devrait également doper les recettes issues de la TTA. De même que l’appropriation progressive du Mobile Money par les opérateurs économiques, pour l’acquittement des impôts et taxes (environ 10 milliards de FCFA d’impôts ont été payés par ce canal en 2021, selon le ministère des Finances, NDLR).
Les craintes du FMI
Pour rappel, entrée en vigueur le 1er janvier 2022, la TTA correspond à 0,2% du montant des opérations de transfert d’argent réalisées par tout moyen ou support technique laissant trace, notamment par voie électronique, téléphonie mobile, télégraphique ou par voie de télex ou télécopie… Cette taxe est également applicable à tous les retraits en numéraire consécutifs à un transfert d’argent effectué auprès des établissements financiers ou des entreprises de téléphonie mobile.
Considérée comme une nouvelle niche de recettes par l’État du Cameroun, la TTA suscite cependant des inquiétudes dans certaines institutions financières internationales. Par exemple, dans un rapport publié en mars 2022, le Fonds monétaire international (FMI) estime que « taxer l’argent mobile peut être fiscalement inéquitable et entraver le faible niveau actuel d’inclusion financière ». Pour cette institution de Bretton Woods, « les segments pauvres et non bancarisés de la population, qui vivent souvent dans des zones rurales et sont confrontés à des coûts de transaction élevés de la part des banques formelles, sont négativement affectés par la mesure ».
Au demeurant, ces craintes du FMI n’échaudent pas l’État du Cameroun, qui entend visiblement capitaliser sur l’explosion des paiements électroniques dans le pays depuis quelques années. En effet, selon les données de la Banque des États de l’Afrique centrale (Beac), en 2020, le Cameroun détenait à lui tout seul 19,5 millions des 30,1 millions de comptes Mobile Money recensés dans la zone Cemac (Cameroun, Congo, Gabon, Tchad, RCA et Guinée équatoriale), soit 64,8% du global. Ce qui correspond à trois fois plus de comptes qu’au Congo (7,1 millions) et quasiment 10 fois plus de comptes qu’au Gabon (2,7 millions), au cours de la même année.
« En termes de nombre de transactions, les prestataires de service de paiement au Cameroun réalisent 73,13% des transactions de la communauté », révèle encore le rapport de la Beac sur « les services de paiement en monnaie électronique dans la Cemac en 2020 ».