(BFI) – Un an après l’ultimatum du premier ministre camerounais, Joseph Dion Ngute, concernant le transfert des fonds dormant à la Caisse de Dépôts et de Consignation (CDEC), le bilan est loin des attentes. Richard Evina Obam, directeur général de la Cdec, révèle que seul 83,5 milliards de Fcfa ont été collectés au 30 avril 2025, un chiffre bien en deçà des 400 milliards de Fcfa initialement envisagés.
La Cdec dit faire face à « une résistance globale » de la part des organismes censés transférer les fonds, comme l’explique Evina Obama. Le secteur bancaire est particulièrement pointé du doigt. Dans notre plan stratégique, on avait envisagé des statistiques qui auraient permis de disposer de bonnes marges de manœuvre. Malheureusement, des acteurs comme ceux du secteur bancaire, n’ont pas joué le jeu » déplore le DG de la Cdec.
Les banques, selon Evina Obam, auraient même réussi à faire du lobbying auprès de la Commission bancaire de l’Afrique Centrale (Cobac) pour obtenir l’interdiction de transférer les avoirs en déshérence. Mais la résistance ne se limite pas aux banques. Les entreprises des secteurs de l’eau, de l’électricité et de la téléphonie sont également réfractaires à transférer les cautions conventionnelles, les considérant comme des avances de consommation.
Le cœur du problème réside dans le différend avec la Cobac. Evina Obam affirme que cette institution en charge de la régulation du secteur bancaire au sein de la sous-région Cemac et la Banque des Etats de l’Afrique Centrale (Beac) ont agi sous la pression du lobby bancaire en interdisant ces transferts. « Nous avons discuté sans trouver un consensus » précise le responsable de la Cdec, soulignant que la Cobac, bien qu’ayant pour objectif de superviser les activités des caisses de dépôts, ne devrait pas considérer des derniers comme des banques.
Cette mesure, jugée préjudiciable par la Cdec, fait l’objet de discussion au niveau communautaire, à l’initiative de la Beac. L’objectif est de faire intervenir le conseil des ministres en charge des Finances, la Cdec demandant simplement et purement le retrait du texte litigieux. La durée de cette procédure reste incertaine.
Les études préalables à l’entrée en service de la Cdec avaient estimé le potentiel de recouvrement à environ 400 milliards de Fcfa. Un chiffre jugé plus réaliste que les 1.000 milliards de Fcfa évoqués par certains experts. Cependant, avec l’intervention de la Cobac, ce plan stratégique doit être revu à la baisse. « 1.000 milliards c’est exagéré. Nous avions un plan de stratégie qui allait chercher dans les 400 milliards de Fcfa. Maintenant, l’on est obligé de le reconsidérer, dans le sens d’un réajustement à cause de la mesure de la Cobac interdisant les transferts ». La nature exacte de ce réajustement n’a pas été indiquée.
Malgré ces difficultés, la Cdec ne reste pas inactive. « On fait déjà avec ce que nous avons. L’argent de va pas dormir » assure Richard Evina Obam. L’institution utilise actuellement les instruments les moins risqués et les plus rentables à savoir les bons de trésors « uniquement » pour le moment en raison de sa fragilité et de la nécessité d’accompagner le trésor Public.
Au 30 avril 2025, si la Cdec a bien mobilisé 83,5 milliards de Fcfa, incluant des fonds issus de la justice, des privatisations, des consignations conventionnelles et même des compagnies d’assurances, les banque, bien que présentes dans les comptes pour 25 milliards de Fcfa, sont loin d’avoir apporté leurs contributions attendues. En effet, elles auraient dû verser « la moitié des 400 milliards de Fcfa initialement ciblé par la Cdec ». Actuellement, ce sont les consignations administratives du Trésor Public et les cautions sur les marchés publics qui représente la part la plus importante avec 38,5 milliards de Fcfa.