(BFI) – Hier mardi 30 septembre 2025 a marqué la fin de l’African Growth and Opportunity Act, plus connu sous l’acronyme d’AGOA. L’expiration de ce programme ouvre une période d’incertitude pour des secteurs clés en Afrique subsaharienne, tandis que Washington envoie des signaux contradictoires.
Après avoir ciblé et démantelé d’autres initiatives d’aide au développement comme l’USAID, le président américain vise désormais l’Agoa. Or cet accord commercial permet aux pays africains éligibles d’exporter des produits vers les États-Unis sans payer de taxes.
Selon Reuters, citant un responsable de la Maison-Blanche, l’administration Trump appuierait un renouvellement d’un an afin de laisser le temps à une révision du dispositif. Cette prolongation pourrait être adossée à une Loi de finances temporaire ou intervenir ultérieurement avec effet rétroactif, si un accord politique se matérialise au Congrès.
L’enjeu immédiat est de plusieurs ordres. Sur le plan commercial, l’absence de régime préférentiel renchérit les coûts à l’entrée du marché américain, alors même que les nouveaux tarifs décidés cette année par Washington inquiètent en Afrique depuis plusieurs mois et ont déjà suscité de nombreux plaidoyers pour une prorogation de l’AGOA.
Sur le plan politique, un signal de l’exécutif américain ne suffit pas : la sécurité juridique pour les investisseurs et les exportateurs dépend d’un support législatif clair, qu’il s’agisse d’une rallonge technique ou d’une réforme plus structurelle.
Lors d’une intervention, le 24 septembre dernier à New York, en marge de la 80ᵉ Assemblée générale des Nations unies, le président Cyril Ramaphosa a rappelé que le renouvellement de l’AGOA constitue un levier essentiel pour préserver et créer des emplois tout en facilitant l’accès des entreprises locales aux marchés internationaux.
Incertitudes
En attendant, le soutien affiché par la Maison-Blanche à une rallonge d’un an soulève plusieurs interrogations. Une extension d’un an, si elle se concrétise, ne ferait que repousser l’incertitude. Les exportateurs africains devront-ils revivre la même échéance dès 2026 ? Ce choix traduit-il une volonté de réformer en profondeur l’AGOA ou s’agit-il d’une mesure transitoire sans perspective claire ? Sous quelles conditions un tel prolongement pourrait-il être adopté, alors que d’autres priorités dominent l’agenda du Congrès ?
25 ans de partenariat mais…
Le partenariat commercial inédit entre les États-Unis et l’Afrique subsaharienne, lancé en 2000 sous le président Bill Clinton, a longtemps été présenté comme un soubassement solide des relations économiques entre les petites et moyennes entreprises africaines et le grand marché américain. Mais le retour de Donald Trump à la Maison Blanche pourrait bien tout remettre en question.
Depuis un quart de siècle, cette passerelle économique unique relie l’Afrique subsaharienne aux États-Unis. Grâce à ce dispositif, 35 pays africains bénéficient d’un accès privilégié au marché américain : près de 7.000 produits peuvent franchir l’Atlantique exemptés de droits de douane.
Mais cette ouverture est soumise à conditions: pour profiter de ces avantages, il faut respecter des critères politiques et économiques stricts. Résultat : des secteurs entiers – textile, agriculture, industries extractives – ont pu se développer, des milliers d’emplois ont pu être créés, notamment à Madagascar, au Lesotho ou en Afrique du Sud. Mais aujourd’hui, ces secteurs sont en danger. Les débouchés alternatifs sont rares, et l’avenir de nombreux travailleurs est incertain.
Premier exportateur africain vers les États-Unis, l’Afrique du Sud redoute la perte de plus de 35.000 emplois dans le seul secteur des agrumes.
Placide Onguéné