(BFI) – Alors que le rideau est tombé en mai dernier sur son précédent accord avec le Fonds monétaire international (FMI), le Cameroun s’oriente déjà vers une nouvelle phase de coopération avec l’institution de Brettons Woods. L’annonce n’est pas encore officielle mais les premiers signaux sont apparus le 17 septembre dernier, lors de la 16e session du comité de pilotage de la plateforme de dialogue sur les finances publiques à Yaoundé.
« Le ministre des Finances, Louis Paul Motaze, a parlé de nouveau programme avec le FMI. (…) Nous retenons la volonté la volonté de l’ensemble de l’Assemblée de vouloir continuer à discuter avec le FMI et potentiellement à ouvrir les négociations pour un nouveau programme. C’est quelque chose qui nous réjouit », a déclaré Sébatien Dibling, chef de la coopération à la délégation de l’Union Européenne pour le Cameroun et la Guinée Equatoriale.
Les discussions en sont à un stade préliminaire. Aucun chiffre, ni sur le montant potentiel, ni sur les contours du futur cadre de coopération, n’a filtré. Mais la perspectives d’un nouvel accord se dessine dans un environnement budgétaire difficile. L’accès aux financements concessionnels se raréfie et, le 9 mai 2025, l’agence Fitch Ratings a averti qu’une absence de soutien du FMI continuerait « un risque majeur » pour la soutenabilité budgétaire du Cameroun.
Selon Fitch, la stabilité financière du pays reste dépendante des créanciers officiels, avec une dette en devises régionales équivalent à 6,1% du PIB en 2024 et seulement 1,6% du PIB arrivant à échéance chaque année. Dans un contexte où plusieurs pays de la zone ont dû rééchelonner leur dette, l’agence considère maintien d’un partenariat avec le FMI comme un signal de crédibilité nécessaire pour continuer à accéder aux ressources extérieures.
Le dernier programme économique et financier du Cameroun, adossé à la Facilité Elargie de Crédit (FEC) et au Mécanisme élargi de crédit (MEC) avait été lancé en juillet 2021 pour trois ans avant d’être prolongé jusqu’en mai 2025. Il a permis des décaissements réguliers, chaque revue validée ouvrant droit à des nouveaux financements. Entre 2021 et 2025, hors décaissement final liés à la 8e revue, le FMI a apporté environ 500 milliards de Fcfa au Cameroun (793 millions de dollars au total). Un appui significatif mais jugé modeste à l’échelle des besoins. En comparaison, la Côte d’Ivoire a obtenu en mars 2025 un programme d’un montant de 2 762 milliards de Fcfa (4,8 milliards de dollars), soit cinq fois le volume perçu par le Cameroun.
Cette différence reflète aussi l’appréciation des performances. Alors que le FMI saluait en mars 2025 les progrès ivoiriens en matière de gestion budgétaire, de mobilisation des recettes et de résilience climatique, il restait plus prudent à l’égard du Cameroun. En janvier 2025, après la 7e revue, l’institution notait des « performances macroéconomiques encourageantes » mais insistait sur les retards dans les projet d’investissement et sur la nécessité d’intensifier les réformes. Le ton était similaire en juillet 2025 lors de la 8e et dernière revue, qui a ouvert la voie au décaissement de 82 milliards de Fcfa.
Dans ses derniers communiqué, le FMI a rappelés les chantiers prioritaires du Cameroun. Accroitre les recettes fiscales hors pétrole, renforcer la discipline dans les dépenses publiques, réduire les arriérés intérieurs et améliorer la gouvernance des entreprises publiques, notamment dans le secteur de l’énergie et du raffinage. Même si le niveau d’endettement est jugé soutenable et amorce une baisse, les risques de surendettement demeurent élevés.
La mobilisation des ressources plus importantes auprès du FMI à l’avenir pourrait dépendre de la capacité de Yaoundé à répondre à ces exigences. Dans un contexte régional où la confiance des marchés est fragile, chaque avancée en matière de transparence budgétaire et de gouvernance devient un argument pour peser dans la balance des négociations.
Paul Nkala