(BFI) – Il y a un peu plus d’un mois, Mohamed Kande a été nommé futur président de PwC, l’une des quatre plus grandes firmes de consulting et d’audit en activité. Son parcours atypique suscite de plus en plus d’intérêt.
Comme il l’évoque dans un blog rédigé sur sa page LinkedIn en février 2023, rien ne semblait le préparer à ce qu’il entreprendra à partir de juillet 2024. Pourtant, sa mentalité de gagneur lui rappelle que tout est possible. « Je ne suis qu’une histoire parmi tant d’autres. Je suis noir, immigré, je parle anglais avec un accent français et je m’appelle Mohamed », écrit-il.
L’histoire de Kande est celle de plusieurs victoires sur sa différence, transformant chaque défi en opportunité. Son exploit le plus récent est la réussite de son examen d’expertise comptable aux États-Unis, le US-CPA, un examen notoirement difficile, un défi d’autant plus à relever dans la cinquantaine avec un agenda professionnel chargé. Seul Kande sait s’il visait déjà la présidence de PwC. Ce diplôme lui a cependant ouvert la voie pour devenir partenaire senior de la branche américaine de la firme, dont il était déjà patron mondial du service conseil et coprésidait le service de consultation aux USA.
L’obtention de ce diplôme tombe à pic, car elle compense une exception dans le profil de Kande. Selon le Financial Times, PwC a toujours été dirigé par des personnes ayant une expérience dans la division fiscalité et audit, une division clé pour les 53 milliards de dollars de revenus annuels du groupe.
À 16 ans, Kande a dû se réinventer. Originaire de la Côte d’Ivoire, il est parti vivre le rêve français, confronté aux difficultés d’être différent dans la France des années 80. Mais il en fallait plus pour décourager cet homme de compétition, pratiquant depuis ses 13 ans le Tae Kwondo, un art martial sud-coréen, forgeant autant le physique que le mental.
Diplômé en ingénierie, il a traversé l’Atlantique pour Montréal, au Canada, afin d’obtenir un diplôme en affaires, avant de se diriger vers les États-Unis. Ce pays, symbole de rêve mais aussi de défis, lui a imposé la barrière de la langue. L’anglais, déjà complexe, se révélait encore plus ardu avec l’accent de Chicago. Kande a appris à lire sur les lèvres et à interpréter les gestes, parfois relisant plusieurs fois des mails pour en saisir le sens. Malgré ces obstacles, il a bénéficié de la confiance de nombreuses personnes.
La présidence de PwC représente une étape ultime pour ce ressortissant de la Côte d’Ivoire. Il prend la tête d’une organisation influente dans un monde moderne plein de paradoxes : redéfinition des alliances entre pays, quête de justice fiscale et bouleversements apportés par l’intelligence artificielle.
Au-delà de ces enjeux, cet enfant de l’Afrique sera scruté et observé, à l’instar de personnalités telles que Barack Obama, ancien président des États-Unis dont le papa était kényan, Tidjane Thiam, figure du développement et de la finance internationale, ou Thierry Tanoh, qui a dirigé la Société Financière Internationale en Afrique et Ecobank, le groupe bancaire panafricain le plus présent sur le continent.
Un nouveau défi qu’il s’est fixé, c’est celui d’être capable, au-delà des différences perceptibles, de réécrire sa propre histoire avec d’autres personnes, en donnant l’opportunité à des potentiels d’éclore. Une ambition que l’Afrique peut lui permettre d’atteindre.
Avec Ecofin