La BCEAO décide le relèvement de son taux directeur à 3,25% à compter du 16 septembre prochain contre 3% actuellement
Il s’agit à mon avis, une fois encore d’une mauvaise décision pour plusieurs raisons:
- Pendant 4 trimestres successifs et ce, depuis juin 2022, la BCEAO n’a cessé de relever son taux directeur qui a été porté à 3%, resté inchangé au cours du dernier trimestre. Malgré ces hausses, le niveau d » inflation reste préoccupant (4% suivant les chiffres officiels) ;
- La BCEAO à l’instar des banques centrales mondiales semble n’avoir toujours pas compris que l’inflation actuelle n’a pas une origine monétaire classique et n’est pas liée à une surchauffe des capacités productives. Elle est due plutôt à un déficit de l’offre mondiale, à une augmentation du coût du fret maritime et au renchérissement du pétrole et du dollar. Sans oublier les conséquences néfastes de la guerre russo-ukrainienne sur les chaines de production mondiales et à des stratégies spéculatives de la part des acteurs. Des lors, les mesures conventionnelles sont contre-productives;
- La BCEAO semble suivre aveuglément les autres banques centrales occidentales notamment la BCE qui n’ont pas les mêmes difficultés que notre zone en matière notamment de performance économique et de financement;
- Les contraintes dans la zone Franc sont nombreuses. Des économies extraverties, une monnaie forte qui arrive difficilement à relancer les exportations, et qui ne facilite pas l’intégration des zones (Cemac, Uemoa et Comores) ; des pays où l’essentiel du tissu économique constitué à 90% de PME et de secteur informel a peu accès au financement;
- En lieu et place de relever les taux directeurs, il aurait fallu réformer les goulots d’étranglement qui handicapent des économies extraverties, réfléchir sur d’autres alternatives au financement de l’économie et poser le débat sur les contraintes liées à l’utilisation du Franc CFA. Devant une telle situation, il aurait été intéressant de mettre en œuvre, au regard du poids important du secteur informel qui échappe souvent aux objectifs de quantification monétaire, une politique d’assouplissement quantitative. Celle-ci a l’avantage de se traduire par des solutions temporaires de planche à billets et des stratégies de rachat d’actifs notamment de créances et d’obligations ;
- La BCEAO gagnerait à repenser ses missions essentiellement inflationnistes.
- Elle devrait faire focus sur le plein emploi qui pourrait se traduire par un appui direct aux États et aux acteurs économiques en utilisant une partie de ses réserves pour financer temporairement des projets ;
- Il devient aussi urgent de repenser nos outils statistiques de mesure des prix. J’observe un décalage entre les niveaux d’inflation annoncés et la vérité des prix sur les marchés
Magaye GAYE, Économiste International – BCEAO (compte officiel)