(BFI) – La hausse des taux d’intérêt et la rareté des ressources sur le marché sont entre autres raisons qui ont imposé la réduction de l’enveloppe, la faisant passer de 200 à 150 milliards de Fcfa.
L’emprunt obligataire 2023 que le Cameroun entend lancer en mi-juin, après obtention du visa de la commission de surveillance des marchés financiers (Cosumaf), va connaitre un changement majeur. Il porte principalement sur la révision à la baisse du taux arrêté dès le départ, soit 200 milliards de Fcfa. Le pays projette de lever plutôt 150 milliards de Fcfa à la Bourse de valeurs mobilières d’Afrique centrale (Bvmac). Plusieurs raisons motivent cette décision.
De sources proches du ministère camerounais des Finances (Minfi), il y a la hausse du taux à partir duquel les banques empruntent auprès de la Banque des Etats de l’Afrique Centrale (Beac), qui a augmenté de 50 points de base, passant de 4,5% à 5%, valeur la plus élevée enregistrée en 13 ans. L’annonce faite à ce sujet de 27 mars dernier a induit une diminution considérable des offres des investisseurs sur le marché des titres publics, concomitamment à la hausse leurs exigences (taux d’intérêt), ce qui a entrainé une chute des enveloppes mobilisées par les Etats. L’autre facteur tient au tôt d’intérêt proposé depuis peu par certains pays de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cemac). En effet le Cameroun, qui a longtemps dominé le marché régional d’émission des titres avec des taux d’intérêts en deçà de 3% pour les Bons de trésors assimilables et 7% pour les obligations de trésors assimilables, est désormais concurrencé par les autres pays de la Cemac qui offrent des taux d’intérêt supérieurs aux siens. Du coup, les investisseurs préfèrent souscrire aux titres émis par le Gabon, le Congo et le Tchad avec des taux d’intérêts qui oscillent entre 5,6% et 7% pendant que le Cameroun tourne autour de 4%.
L’autre contrainte qui impose au Cameroun de revoir ses ambitions à la baisse, c’est le niveau d’inflation en zone Cemac. Il se situe désormais entre 6,4% contre 4,1% en mars 2022, ce qui rend de fait le taux d’intérêt réels de tout titre émis à moins de 6,4% négatif. A cela s’ajoute le fait que le taux de liquidité dans le système bancaire au premier trimestre a baissé du fait entre autres, de la politique monétaire restrictive mise en place par la Beac pour restreindre l’accès aux crédits et lutter contre l’inflation. Ceci se manifeste par la réduction de l’injection des liquidités depuis l’année dernière, puis à sa suspension depuis février 2023. Ce n’est pas tout. La Beac procède aussi au retrait des ressources auprès des banques, ce qui réduit considérablement leur marge de manœuvre.
Solutions
Dans la même logique, les cinq investisseurs retenus pour mener à bien cet emprunt obligataire peinent à faire des prises fermes importantes comme par le passé. D’après certaines sources, dans l’hypothèse de mobiliser 200 milliards de Fcfa, le Cameroun s’attendait à ce que ces arrangeurs fassent une prise ferme d’au moins 80% du montant sollicité. Mais ceux-ci n’ont proposé que 51%, soit 102 milliards de Fcfa. Une somme jugée insuffisante par les responsables chargés de piloter cette opération.
Mais, le Cameroun semble avoir trouvé une meilleure formule pour aguicher davantage ces investisseurs. Ainsi pour sa prochaine sortie, l’Etat prévoit de faire un emprunt obligataire à taux multiples subdivisé en trois tranches. La première émission de 50 milliards de Fcfa pourrait se faire à travers des titres publics d’une maturité de 4 ans au taux d’intérêt de 6%. La deuxième sortie de 80 milliards de Fcfa est envisagée avec une maturité de 6 ans pour un taux d’intérêt de 6,75%. La dernière opération portera sur un montant de 20 milliards de Fcfa à 7,25% pour une maturité de 8 ans. A travers cette approche, l’Etat veut rompre avec la chute des taux de souscription observée sur ses premières émissions entre janvier et mars 2023.
André Noir