(BFI) – Avocate au barreau de Paris, Fatimata Tagourla, analyse la portée du contenu local dans les industries extractives en Afrique.
Il est difficile de définir le contenu local sans parler de ses objectifs. Le contenu local ou local content vise essentiellement à :
-Faire profiter les communautés locales de l’exploitation des ressources naturelles ;
-Promouvoir la fourniture des biens et services, nécessaires à cette exploitation, par les entités juridiques locales ;
-Développer la main-d’œuvre locale par un transfert de technologie
L’engouement des pays hôtes des investissements pour le contenu local trouve sa justification dans l’idée que les ressources naturelles appartiennent au peuple et que celui-ci doit en profiter.
Stratégies de contenu local :
L’approche normative, à la différence de la seule démarche incitative, semble de plus en plus faire la faveur des États hôtes des investissements. Elle consiste en l’édiction d’un cadre juridique auquel ls investisseurs sont tenues de se conformer.
C’est la démarche suivie par exemple par le Sénégal et le Nigéria dans le domaine des hydrocarbures. La Mauritanie est également sur la même lancée.
Sans revenir dans le détail sur les principales dispositions de ces différents textes, on peut noter que l’article 7 de la loi n° 2019-04 du 19 janvier 2019 du Sénégal dispose que les investisseurs « emploient en priorité du personnel sénégalais lorsque celui-ci dispose des compétences requises ». De même l’article 8.3 du même texte précise que tout investisseur (sous-traitant, prestataire de services ou sous-traitant) « doit créer une entreprise de droit sénégalais dont le capital est ouvert aux sénégalais » selon les modalités fixées par décret.
Défis :
Si l’objectif principal du contenu local est l’inclusion des capacités nationales dans la chaine de valeur des industries extractives, il convient néanmoins de rappeler que plusieurs défis demeurent.
Le droit des investissements suppose une démarche de gagnant-gagnant dans laquelle les parties (États et investisseur) préservent leurs intérêts. La question de la combinaison ou de la conformité des politiques nationales de contenu local avec les instruments juridiques liant les États aux investisseurs (contrats avec les investisseurs, Traités bilatéraux d’investissement) peut parfois se poser. Par ailleurs, l’adaptation de la législation nationale préexistante avec les nouveaux textes relatifs au contenu local peut aussi s’avérer nécessaire.
D’où la nécessité pour les Etats de s’entourer de conseils dotés de l’expertise nécessaire pour les accompagner dans la négociation et la conclusion des contrats d’investissement.
L’autre défi qui se pose est technique. Il est relatif au renforcement des capacités des acteurs locaux appelés à intervenir dans la chaine de valeur. Il faut en effet permettre à ces acteurs d’être compétitifs dans la fourniture de biens et services.
Enfin, si le succès du contenu local suppose une claire définition des objectifs en amont, il impose également une démarche de suivi-évaluation claire et transparente afin d’en mesurer l’efficacité.
Fatimata Tagourla, Avocate au barreau de Paris