(BFI) – L’aquaculture, secteur peu développé au Cameroun, pourrait permettre à l’économie nationale de résorber le chômage des jeunes et réduire le déficit de la balance des paiements. A condition, bien entendu, que les acteurs de la filière (public et privé), évoluant actuellement en rang dispersés, parviennent à accorder leurs violons, pour moderniser l’aquaculture. Partant des faiblesses et limites dans le domaine de la pêche industrielle et maritime, il est de l’intérêt de ces derniers d’agir maintenant sur deux leviers majeurs. La première proposition est de changer de paradigme et de regard sur l’aquaculture. Il ne faut plus pratique l’aquaculture comme une activité de subsistance, de loisir ou même comme une activité secondaire. C’est un travail à plein temps, un business florissant, rentable qui pourrait créer de milliers d’emploi, de la richesse, contribuer de manière significative à gagner des points de croissance à l’économie. La production aquacole nationale est de 15 00 tonnes. Elle ne reflète pas l’énorme potentiel dont regorge le pays. Une performance bien en deçà des ambitions des pouvoirs publics de produire 50 000 tonnes de poisson de table, à l’horizon 2030. L’interprofession aquacole, en place depuis 2019, devrait prendre le taureau par les cornes et développer des stratégies pour intéresser plus de jeunes à cette filière.
Le deuxième levier sur lequel les acteurs devraient travailler est la maitrise des facteurs de production des intrants. C’est le volet qui alourdit les factures et décourage le plus. Les aliments et alevins sont en grande partie importés, même si l’offre locale est perceptible. Cela fait perdre beaucoup de devise à l’économie nationale. A titre d’illustration, les experts s’accordent à dire que l’aliment représente 75% des coûts de production des poissons de table. Alors que le Cameroun dispose des matières premières nécessaire à la production d’aliments, il est paradoxal de constater que 700 tonnes d’aliments ont été importés en 2021, pour une valeur financière de 840 millions de Fcfa. C’est de l’argent jeté par la fenêtre, qui aurait pu contribuer à mettre en place des unités de productions locales. Aujourd’hui on dénombre 13 acteurs, importateurs et marque importées d’aliments, pour distribuer ces aliments au Cameroun. On ne devrait pas en arriver là. Il faut produire localement ces intrants nécessaires au développement de l’aquaculture. La nom maitrise de la technologie ne saurait expliquer à elle seule ce recours aux importations massives.
Maintenant que la viande de bœuf est hors de portée de la ménagère ordinaire, le poisson pourrait constituer un substitut. Si la production des intrants est localement maitrisée, il n’y a pas de raison que le poisson de table coûte cher. Il sera à la portée de toutes les bourses. La production aquacole pourrait d’ailleurs contribuer à réduire le gap actuel relevé dans la production halieutique nationale, estimé à 350 000 tonnes alors que la demande agrégée est de 400 000 tonnes. Le Cameroun a, par exemple, dépensé 154 milliards de Fcfa pour les importations de poisson en 2018. Devons-nous continuer à croiser les bras ? Non. Le projet de promotion de l’entreprenariat aquacole, mise en place par l’Etat du Cameroun entre 2016 et 2019, est une expérience réussie qui a permis de créer 1500 emplois. 300 petites entreprises sont en activité dans la chaine de valeur de l’aquaculture. Il faut dupliquer cette expérience et mobiliser plus d’hommes dans les étangs et autres cours d’eau pour produire plus. C’est un créneau porteur, les investisseurs locaux n’ont rien à craindre. Le retour sur investissement est certain et garanti sur une période relativement courte.