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Laurent Bossard : « La transformation des villages en ville est le moteur de l’urbanisation africaine »

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(BFI) – La Banque africaine de développement, la Commission économique pour l’Afrique des Nations unies et le Club du Sahel et de l’Afrique de l’Ouest viennent de publier un rapport sur l’urbanisation en Afrique. Le texte décrit un tissu urbain en évolution rapide, la transformation de nombreux villages en villes et de fait un tout nouveau type de relations entre villes et campagnes. Laurent Bossard, du club du Sahel et de l’Afrique de l’Ouest, l’invité de Business & Finance International nous en dit d’avantage sur ce sujet.

Est-ce qu’en quelques mots vous pouvez nous rappeler quelle est la place des villes sur le continent africain ?

Entre 1950 et 2010, la population du continent a été multipliée par cinq, dans la même période le nombre d’urbains a été multiplié par vingt. Désormais plus de 50% des Africains vivent dans une agglomération urbaine.

Et de quel type de tissu urbain parle-t-on ? Est-ce qu’en Afrique on a plutôt des villes capitales qui seraient très concentrées ou au contraire des réseaux de villes moyennes étendues sur le territoire ?

Alors effectivement, la perception générale de la ville africaine, c’est Lagos, Abidjan, Le Caire, etc… Or les villes de plus d’un million d’habitants, les villes capitales, les grandes capitales économiques, c’est 1% du nombre d’agglomération sur le continent. Plus de 90% des agglomérations sont constituées par des villes de moins de 100 000 habitants. Beaucoup de villes petites et moyennes qui croissent à une vitesse extrêmement forte et dont le moteur d’augmentation de la population n’est pas, contrairement à ce que l’on croit également, l’exode rural, mais le fait que les gens naissent dans les villes. Le principal moteur de l’urbanisation africaine, aujourd’hui, ce n’est pas le fait que les gens quittent les villages pour aller dans les villes, mais c’est le fait que les villages se transforment en ville sous le simple effet de la croissance de la population.

Est-ce que c’est connu ça par les pouvoirs publics africains ? Est-ce que cette image est celle qui guide à l’heure actuelle l’élaboration des politiques publiques ?

Non, ce n’est pas pris en compte, c’est très peu pris en compte. On a seulement une poignée, une petite poignée de pays qui se sont dotés de politiques urbaines. Ils ont tous des politiques de développement rural, mais des politiques de développement urbain sont extrêmement rares.

Alors dans votre rapport vous insistez sur les aspects positifs de l’urbanisation en Afrique. Ce que vous dites au regard des données, c’est qu’économiquement les villes sont un véritable moteur pour les pays…

Évidemment, comme elles le sont absolument partout, et peut-être même un petit peu plus. En Afrique subsaharienne, le principal secteur de l’économie, celui qui occupe les deux tiers de la population, c’est ce qu’on appelle l’économie alimentaire. Cette économie alimentaire, c’est tout ce qui se passe en amont et en aval de la production agricole. Or la ville d’abord, c’est le lieu où l’on consomme ce que produit l’agriculture, c’est aussi le lieu où très principalement on transforme, c’est le lieu où l’on s’approvisionne en intrant, en engrais, c’est le lieu où on vend les produits alimentaires dans les innombrables restaurants de rue, sur les trottoirs que vous connaissez etc. Donc cette économie alimentaire qui est le cœur de l’économie de l’Afrique subsaharienne et bien cette économie, elle est à la fois rurale et à la fois urbaine.

Oui, parce qu’une des principales conclusions du rapport que vous publiez, c’est qu’on ne peut plus opposer comme c’était fait jusque-là, le milieu urbain au milieu rural…

L’Afrique est en train de se doter d’un réseau urbain complet. Vous savez dans un pays comme le Niger, qui est un pays encore majoritairement rural, il y a entre deux et trois villes de plus de 10 000 habitants qui apparaissent chaque année. C’est l’urbanisation qui vient des campagnes, ce sont des villages qui se transforment en ville et qui deviennent des marchés, des centres de services, des centres de santé, des centres d’éducation. En 1960, si vous n’étiez pas dans la capitale, vous étiez absolument isolé et dans l’incapacité de vous rendre dans une ville. C’était trop loin, c’était trop compliqué. Aujourd’hui, vous avez forcément une ville à proximité, 50% des ruraux vivent à moins de 15 kilomètres des villes. La croissance économique, les filières économiques, les filières alimentaires sont urbano-rurales ou ruralo-urbaines. Il y a une intense circulation des biens, une intense circulation des personnes, et c’est sur cette intense circulation que se construit le développement économique de l’Afrique.

Rédaction
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