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«La monétique ne doit pas être l’apanage d’une élite» Minayegnan COULIBALY, Directeur Général du GIM-UEMOA

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(BFI) – L’interbancarité monétique dans l’espace UEMOA n’est plus une option mais une nécessité. Elle offre des avantages certains, notamment quand le volume de transactions devient important. Cela se traduit par une réduction de la circulation fiduciaire, qui coûte cher, et un impact direct sur la promotion de l’inclusion financière. Pour les consommateurs, l’interbancarité signifie des services plus pratiques et plus efficaces.
C’est en substance, le message qu’a voulu passer M. Minayegnan COULIBALY, Directeur Général du GIM- UEMOA, l’entité en charge de l’interbancarité monétique régionale dans l’espace UEMOA. Cet Ingénieur Informaticien de formation, titulaire d’un MBA de l’Essec Business School (France) et de la Mannheim Business School (Allemagne), possède une grande expérience dans les solutions d’Intégration. Expérience acquise notamment auprès de multinationales comme BULL, CFAO Technologies ou ORANGE.
Dans cette interview, M. COULIBALY nous explique la mission et les perspectives du GIM-UEMOA, tout en nous livrant son analyse fine et acérée des enjeux de la monétique en Afrique.

D’abord quelques mots sur l’opportunité de la création de GIM-UEMOA, y avait-il un réel besoin de créer cette entité alors que le système bancaire fonctionnait très bien ?

Je dirai que la création du GIM-UEMOA aurait dû arriver plus tôt. Il était en effet devenu nécessaire d’assurer l’interopérabilité entre les différentes banques établies dans les huit pays de la zone UEMOA. Ce qui risquait d’arriver était de voir chaque pays assurer son interopérabilité bancaire. On aurait eu huit systèmes différents les uns des autres. Cela n’aurait pas été efficient.
Avec la création en 2003 du GIM-UEMOA, on a désormais plus de fluidité dans les transactions interbancaires au sein de la zone. Il n’y a plus de complexité de passer d’une banque à une autre. Le GIM-UEMOA a pu en 17 ans asseoir le concept d’interopérabilité sur un seul instrument de paiement : la carte bancaire.

Quelles ont été les contraintes majeures de la mise en place de cette interopérabilité, les banques se sont-elles montrées coopératives ?

Cela n’a pas été simple, puisqu’il fallait gagner sa légitimité. Il fallait également que le projet soit porté par l’ensemble des acteurs de la communauté. Il y a eu des réticences au début mais certaines banques ont tout de suite pris le train en marche. Je voudrais d’ailleurs saisir l’occasion pour leur rendre hommage. Ce sont les membres fondateurs du GIM-UEMOA et ce sont essentiellement des banques locales.
Les filiales de groupes bancaires internationaux ont pris un peu plus de temps avant de nous rejoindre. Mais ce qu’il faut retenir c’est qu’aujourd’hui, toutes les banques et établissements financiers de l’UEMOA, en dehors de celles qui n’ont aucune activité monétique, sont membres du GIM-UEMOA et connectés à la plateforme interbancaire régionale.
Par ailleurs, depuis janvier 2020, la Banque Centrale a autorisé que les Trésors publics soient également membres du GIM-UEMOA pour accélérer la digitalisation des flux publics dans nos Etats.

Au niveau de la sécurité, quels sont les dispositifs et mécanismes que le GIM-UEMOA a mis en place pour rassurer ses membres et surtout l’usager ?

La sensibilité de notre activité nous oblige à mettre constamment la question de la sécurité au cœur de notre action. Nous sommes aujourd’hui conformes à toutes les normes de sécurité et autres exigences règlementaires pour assurer la protection de nos plateformes et la sécurité des transactions. Nous avons une haute disponibilité de nos infrastructures et une continuité d’activité garantie en cas de force majeure.
Le GIM-UEMOA met également l’accent au niveau de ses membres sur l’adoption d’un certains référentiels et bonnes pratiques qui au final doivent permettent aux utilisateurs finaux d’avoir la meilleure expérience possible à chaque fois qu’ils opèrent dans le réseau interbancaire.

Nous vivons actuellement une période particulièrement marquée par cette pandémie qu’est la Covid-19. Comment a-t-elle impacté les activités du GIM-UEMOA et quelles ont été les mesures prises par l’institution pour minimiser ses effets ?

Je pense que globalement, nous avons bien géré la crise. Nous avons eu des réunions régulières avec nos administrateurs pour les rassurer sur la prise en charge de cette crise. Nous avons tout de suite mis en place un comité de suivi pour pouvoir faire le point de la situation et faire la veille sur les informations communiquées par les autorités afin de prendre les mesures idoines.
En interne nous avons dû revoir et réadapter notre façon de travailler avec l’introduction du télétravail au niveau des équipes, quand cela était possible. Des actions de sensibilisation et d’accompagnement de nos collaborateurs ont également été menées ; certaines se poursuivent encore actuellement.
Nous avons également fait des efforts en direction de la communauté en appliquant une baisse des tarifs des retraits interbancaires à hauteur de 50% sur une période allant d’avril à fin juin 2020. C’était un effort structuré par la BCEAO auquel nous avons pris part en jouant notre partition.

Quels sont selon vous, les grands défis de la monétique en Afrique ?

Nous sommes aujourd’hui en plein dans l’ère des services financiers numériques ; le premier défi est lié au fait que la monétique doit être une affaire des masses populaires. Il faut qu’elle se démocratise et se vulgarise et qu’elle ne soit pas l’apanage d’une élite. Cela passe par l’intégration et l’adoption de nouvelles méthodes et usages de paiement ; dans notre zone, les usages adossés au mobile sont en pleine expansion et représente une réelle alternative dans les zones où la carte a du mal à prendre
C’est dans cette dynamique d’élargissement de l’écosystème que s’inscrit le projet de mise en œuvre de la nouvelle plate-forme d’interopérabilité des services financiers numériques qui au-delà de la carte bancaire va intégrer le mobile et de nouveaux acteurs comme les EME et les SFD , et permettra par exemple des virements de compte à compte : entre comptes de monnaie électroniques (y compris d’opérateurs différents), entre comptes bancaires et entre comptes bancaires et comptes de monnaie électronique.

Comment le GIM-UEMOA se prépare-t-il à être partie prenante pour relever tous ces grands défis ?

Nous sommes déjà partie prenante puisque nous faisons partie du groupe projet qui travaille aux côtés de la BCEAO et d’autres acteurs, sur la mise en oeuvre de la plateforme d’interopérabilité, dont le GIM-UEMOA sera l’opérateur technique. Nous avons participé à toutes les étapes du projet. Nous allons à terme avoir plusieurs plateformes d’interopérabilité en exploitation, ce qui veut dire concrètement que nous pourrons optimiser ces plateformes, induisant une baisse progressive des tarifs à la clientèle finale. C’est donc un travail important de modernisation de tout ce qui est système de paiement de masse qui est en cours.
Il faut également savoir que le GIM-UEMOA est un schéma de paiement régional avec la carte GIM, utilisable dans tout l’espace UEMOA. Cette carte est une véritable alternative aux cartes internationales car elle permet à très faible coût (500 F CFA TTC maximum) de faire des opérations dans tous les guichets automatiques de banques dans tous les pays de l’UEMOA.
Nous travaillons par ailleurs grâce à des partenariats avec d’autres régions et d’autres switchs à permettre aux porteurs de la carte GIM de pouvoir les utiliser au-delà des frontières de l’UEMOA. Ces initiatives viendront fortement impacter l’attractivité de notre schéma de paiement régional pour le bien des utilisateurs finaux.
Enfin je voudrais terminer en disant que nous continuerons notre activité d’appui aux banques et établissements financiers qui nous ont soutenu depuis la création du GIM-UEMOA .
Il s’agit de notre activité de « processing ou délégataire » qui consiste à mutualiser la plateforme monétique pour permettre à des banques locales ou régionales aux moyens (technologiques et humains) souvent limités, d’offrir à leurs clientèles des services financiers digitaux au même titre que celles appartenant à des groupes bancaires plus importants.

Business Africa

Rédaction
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