(BFI) – A compter du 11 avril 2021, l’armateur français CMA CGM supprimera sa double escale dans les ports camerounais de Douala et de Kribi, pour ne maintenir qu’une seule revèle Investir au Cameroun.
Concrètement, à partir de la date sus-indiquée, CMA CGM ne déchargera plus de conteneurs au port de Douala, dans la capitale économique camerounaise. La suppression de cette escale se fera au profit du port en eau profonde de Kribi, dans la région du Sud, dont le terminal à conteneurs est opéré par cet armateur français, dans le cadre d’une co-entreprise avec le logisticien français Bolloré et le Chinois CHEC, qui est aussi le constructeur de la plateforme portuaire de la cité balnéaire de Kribi.
Deux principales raisons sont invoquées pour justifier cette décision. Il s’agit d’abord des lenteurs observées dans le traitement des navires sur le terminal à conteneurs. « Alors que le port est doté de trois portiques, il y a tous les jours des navires qui travaillent avec leurs grues de bord. Pour décharger un feeder, il faut actuellement 72 heures, contre 48 heures en temps normal », révèle le panafricain Jeune Afrique. Cette réalité prolonge également les délais d’attente des navires à la bouée de base. « Pour ne pas louper d’autres escales, certains opérateurs sont parfois obligés de repartir après deux jours d’attente, sans pouvoir décharger leurs navires », souffle un opérateur économique.
« Jeune Afrique fait une analyse erronée. Les temps d’attente en rade ne sont pas différents de ceux de 2019 », rétorque une source interne au Port autonome de Douala (PAD), l’entreprise chargée de la gestion de la plateforme portuaire de la capitale économique. À en croire la même source, la décision de CMA CGM de partir du port de Douala est une conséquence de la perte des avantages tarifaires anciennement offerts à cet armateur par le groupe Bolloré, qui a finalement été écarté de la gestion du terminal à conteneurs du port de Douala en fin d’année 2019, au terme d’un appel d’offres controversé.
L’autre raison invoquée pour justifier la décision de l’armateur français est l’augmentation des tarifs au port de Douala. De ce point de vue, l’on se souvient que dans une lettre adressée au DG du PAD par le président du Groupement inter-patronal du Cameroun (Gicam), le 4 janvier 2021, Célestin Tawamba portait déjà à l’attention de Cyrus Ngo’o sur les « préoccupations des entreprises relatives à certains tarifs portuaires ». Mais, avant cette lettre de la plus grande organisation patronale du Cameroun, l’Union des consignataires et armateurs du Cameroun (Ucam) était déjà montée au créneau dans une lettre adressée au DG du PAD le 3 novembre 2020, pour dénoncer « la facturation des conteneurs vides ».
Une perte de 23% du trafic à Douala
« Les membres de l’Ucam continuent de recevoir des factures de redevance marchandise émises par le PAD pour les conteneurs vides, embarqués ou débarqués, bien que ceux-ci n’apparaissent pas sur les manifestes. Face à la rupture actuelle des conteneurs vides dans le monde, ce surcoût pose un sérieux préjudice aux armateurs dans la mesure où ceux-ci le supportent entièrement », écrivait l’Ucam, qui est revenue à la charge le 6 janvier 2021, en adressant une nouvelle lettre de protestation au DG du PAD.
Dans les milieux portuaires, divers opérateurs confirment cette augmentation des tarifs, avec d’ailleurs quelques indications précises sur les chiffres. Par exemple, l’arrivée de la Régie du terminal à conteneurs (RTC), qui opère le principal terminal du port de Douala depuis le 1er janvier 2020, s’est accompagnée de l’instauration d’une redevance sécurité, dont le montant est de 2000 et 3000 FCFA, respectivement pour les conteneurs de 20 et 40 pieds ; d’une taxe d’encombrement appliquée aux conteneurs ayant passé plus de 15 jours sur le terminal, et dont les montants sont respectivement de 188 375 FCFA et 316 749 FCFA pour les conteneurs de 20 et 40 pieds, etc.
Suite à la décision de l’armateur CMA CGM de supprimer son escale de Douala, la plateforme portuaire de la capitale économique camerounaise devrait perdre les 23% du trafic conteneurisé attribué à cet opérateur en 2020. Ces parts de marché devraient être transférées vers le port en eau profonde de Kribi, contribuant ainsi à booster les performances de cette autre plateforme portuaire camerounaise présentée comme l’une des plus importantes sur la côte ouest-africaine. Mais, qui tarde encore à s’affirmer comme une véritable alternative au port fluvial de Douala, qui demeure la principale porte d’entrée du Cameroun, avec plus de 90% du trafic, selon les statistiques officielles.